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Rencontre avec Liam Ó Ruairc, écrivain républicain et socialiste Irlandais, à l’occasion du 27ème festival du livre de Carhaix qui avait lieu les 29 et 30 octobre et qui était consacré à l’Irlande.
Liam Ó Ruairc, originaire de Belfast, venait en effet de publier : « Paix ou Pacification ? L’Irlande du Nord après la défaite de l’IRA » aux éditions “Stourmomp”.
Un ouvrage qu’il présente comme ceci :

« Depuis des années, les pouvoirs dominants et leurs médias vantent les mérites du « processus de paix » nord irlandais. La présente étude cherche à montrer que ce processus n’arrive pas à lier “paix” et “justice” et que pour cela il est plus exact de parler de « processus de pacification ».
Contre les discours dominants réduisant ce qu’on appelle la “question irlandaise” à un problème insulaire et à des haines ancestrales, cette étude la place dans le contexte du colonialisme, de l’impérialisme et des luttes de libération. »

A l’occasion de la venue de Liam Ó Ruairc en Bretagne venu pour y présenter son livre « Paix ou Pacification ? L’Irlande du Nord après la défaite de l’IRA » paru aux éditions STOURMOMP, les militants du NPA Finistère ont réalisé cette entrevue avec l’auteur. Nous la republions donc.

Question : Quelles sont les principales thèses défendues par cet ouvrage ?

L’État britannique sort vainqueur du conflit qui l’a opposé à l’IRA durant des années.

Les républicains irlandais acceptent à présent les termes politiques pour la résolution du conflit proposés par leur adversaire depuis 1972.

La souveraineté de l’État britannique (sur les 6 comtés) a été renforcée par les Accords de 1998.

Ces Accords loin d’être un compromis honorable représentent un changement constitutionnel déséquilibré en faveur de l’unionisme. Pour reprendre les mots de Tony Blair, Premier Ministre britannique : « Ces Accords offrent aux unionistes toutes les exigences-clés qu’ils ont formulées depuis la partition il y a 80 ans. »

Si on traduisait la chose en langage syndical, on devrait dire que la direction républicaine a réussi à obtenir une semaine de six jours et une baisse des salaires. Le Sinn Féin déguise son échec stratégique comme une ‘nouvelle phase de la lutte’. C’est un peu comme ce général qui aurait un jour déclaré ‘nous ne reculons pas, nous manœuvrons’.

Mais comme l’a souligné Bernadette Devlin-McAliskey, d’un point de vue républicain le proces- sus de paix ne pouvait être qu’« idéologiquement mauvais et tactiquement stupide » ; vu que son objectif principal était « la dé-militarisation, la dé-radicalisation et la dé-mobilisation du mouvement de résistance » et cela s’est avéré vrai. Non seulement cela représente une défaite pour le républicanisme, mais le Sinn Féin rejoint le système auquel il était opposé.

Ce à quoi le processus a aboutit est au mieux une espèce de version irlandaise du pacte Hitler-Staline plutôt qu’un modèle pour la paix mondiale.

L’ouvrage montre aussi que le ‘processus de paix’ en Irlande du Nord n’est pas seulement politique, mais comprend également un volet économique basé sur l’idée que le néo-libéralisme favorise la paix et la prospérité. Dans ce village Potemkine de la paix néo-libérale qu’est l’Irlande du Nord, l’ouvrage prouve que ceux qui ont été le plus affectés par le conflit ne sont pas ceux qui bénéficient des supposés ‘dividendes de la paix’ et dans beaucoup de cas leur situation sociale et économique s’est détériorée depuis 1998.

Ce qui existe aujourd’hui en Irlande du Nord est un simulacre de paix et pas une paix véritable, car ce n’est pas une paix fondée sur la vérité (l’idée de vérité est vue comme néfaste), la liberté (vu que la domination de l’État britannique a été renforcée) et l’égalité (étant donné que les inégalités sociales et économiques se sont approfondies). C’est pour cela qu’il est préférable de parler de ‘processus de pacification’ au lieu de ‘processus de paix’. Le ‘processus de paix’ ne peut pas même être qualifié de ‘révolution passive’.

Il faut aussi souligner que cet ouvrage critique non la ‘paix’ mais le ‘processus’. Que l’IRA mette fin à ses actions armées est une chose qui peut se comprendre mais le Sinn Féin rejoindre le camp adverse une autre !

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L’ouvrage donne une grande importance au contexte historico-mondial. Pourquoi ?

Il est erroné de voir l’Irlande du Nord comme un problème ‘insulaire’. Il faut voir cette question dans le cadre global de l’impérialisme et des luttes de libération. La résistance irlandaise a été très fortement associée à la montée des mouvements anti-impérialistes et anti-coloniaux. Le ‘processus de paix’ est un symptome de la crise et du déclin de ces mouvements à l’échelle internationale.

Le changement des rapports de force à l’échelle internationale après la chute de ce qu’on appelait le ‘socialisme réellement existant’ a mis les mouvements de libération nationale ‘réellement existants’ et autres forces anti-systémiques dans une position de faiblesse et les force à accepter des termes défavorables. C’est dans ce contexte qu’il faut voir le processus de pacification et ce qui l’a rendu possible. Le ‘processus de paix’ est la version irlandaise de la thèse proclamée par l’idéologue de la Maison Blanche Francis Fukuyama de la ‘fin de l’histoire’.

Comment expliquer que le gros des sympathisants du Sinn Féin et de l’IRA Provisional soient restés loyaux au mouvement et sa direction alors que ceux-ci ont abandonné les principes républicains ?

Le fait d’être loyal au mouvement plutôt qu’à l’idéologie est le facteur décisif. Le vétéran républicain Brendan Hughes rappelait que le mouvement a toujours exploité la loyauté de ses membres. Cela indique la primauté de l’unité organisationnelle sur l’unité autour de principes idéologiques. C’est la version irlandaise de la maxime social-démocrate ‘le mouvement est tout, les principes ne sont rien’.

Un autre point important est que la direction du Sinn Féin et de l’IRA est arrivée à vendre à leur base la dilution de leurs principes en déclarant que ce n’étaient pas des ‘principes’ mais des ‘tactiques’. La confusion délibérée des principes et des tactiques débouche sur une situation ou il n’y a plus aucun principe et tout est juste une ‘tactique’.

En termes de comparaison internationale, le journaliste et politologue Kevin Rafter ne trouve pas d’autre exemple de mouvements politiques qui ont été aussi loin que le Sinn Féin et l’IRA dans la dilution de leurs principes fondamentaux : « Aucun autre parti politique en Europe n’a subi une telle révision radicale de ses principes de base, pas même les anciens partis communistes en Europe centrale et orientale qui se sont transformés en entités sociales démocrates au lendemain de la chute du bloc soviétique » écrit-il dans son livre de 2005 sur le Sinn Féin.

Sur cette base il est possible de déguiser l’opportunisme en ‘pragmatisme’ et ‘réalisme’.

En termes de couverture médiatique ce sont les organisations républicaines voulant poursuivre la lutte armée qui reçoivent le plus d’attention. Que penser de celles-ci ?

Pour utiliser les termes de Gramsci, ces organisations veulent engager une « guerre de mouve- ment » alors que non seulement on n’est pas même capable de se lancer dans une « guerre de position » mais l’heure est à battre en retraite stratégique !

Le dirigeant républicain Brendan Hughes soulignait qu’en Irlande du Nord non seulement les gens en ont marre de la guerre, mais ils en ont marre de la politique tout court. Il n’y a aucun appétit pour la guerre et très peu d’intérêt pour la politique. On vit dans une époque thermidorienne où on assiste à l’atomisation, la dépolitisation, la dé-mobilisation et la dé-radicalisation des acteurs sociaux et politiques. Le capitalisme malheureusement semble l’ horizon indépassable de notre temps.

Ces organisations mènent des actions armées mais n’ont même pas commencé à se lancer dans la bataille des idées. La bataille la plus importante à mener aujourd’hui est la bataille des idées. L’impératif est de forger une « direction intellectuelle et morale » (pour encore emprunter un concept gramscien) et non des actions armées qui ont des effets politiques très réduits.

Cet ouvrage éspère contribuer à cette bataille des idées et offrir un contrepoids à la ‘propa- gande de la paix’ qui domine aujourd’hui le discours sur l’Irlande du Nord. Pour conclure en termes de perspectives: « Pessimisme de l’intelligence, optimisme de la volonté »…

Le 27ème festival du livre de Carhaix (29 et 30 octobre) est consacré à l’Irlande. Ce rendez-vous incontournable de l’édition et du livre en Bretagne n’hésite pas à choisir des thèmes à la frontière du culturel et du politique. En consacrant son édition de 2016 à L’Irlande, 100 ans après l’insurrection de 1916 le festival ne déroge pas à cette tradition.

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Le programme et la liste des auteurs et éditeurs présents (de langue bretonne ou de langue française) est consultable ici et . Un certain nombre d’auteurs Irlandais et d’officiels de la république d’Irlande seront présents.

Par ailleurs un colloque aura lieu le vendredi 28 et le samedi 29 octobre coorganisé par le C.R.B.C. de l’Université de Rennes 2 et en partenariat avec l’association Breizh-Eire sur l’histoire des relations britto-irlandaises.

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Nous attirons votre attention sur la présence à ce festival incontournable de Liam Ó Ruairc, écrivain républicain et socialiste Irlandais de Belfast qui vient de publier : « Paix ou Pacification ? L’Irlande du Nord après la défaite de l’IRA » aux éditions “Stourmomp”.

Un ouvrage qu’il présente comme ceci :

“Depuis des années, les pouvoirs dominants et leurs médias vantent les mérites du «processus de paix» nord irlandais. La présente étude cherche à montrer que ce processus n’arrive pas à lier «paix» et «justice» et que pour cela il est plus exact de parler de «processus de pacification».
Contre les discours dominants réduisant ce qu’on appelle la «
question irlandaise» à un problème insulaire et à des haines ancestrales, cette étude la place dans le contexte du colonialisme, de l’impérialisme et des luttes de libération.”

Il viendra pour présenter son livre le vendredi 28 octobre à Guingamp au Centre Culturel Breton à 18H30 (vente et signature sur place). Ce sera un moment privilégié pour discuter avec ce partisan de l’Irlande réunifiée et néanmoins universitaire stimulant, qui jette un regard critique sur la pacification.

Pendant le festival du livre de Carhaix vous pourrez le rencontrer le samedi de 14h00 à 16h00 et le dimanche de 10h00 à 12h00 sur le stand des éditions Coop Breizh qui distribue l’ouvrage.

Le livre est disponible en pré-vente pour 14 €, frais de port inclus pour l’hexagone sur le blog de Stourmomp qui est un collectif militant pour l’édition et la diffusion de matériel (en français ou en breton) de réflexion au service de la construction d’une république bretonne, libre, réunifiée, brittophone, socialiste et féministe dans une perspective internationaliste.

Compagnon de route des courants socialistes républicains irlandais, Liam Ó Ruairc a été un contributeur fréquent du (regretté !) site francophone Libération Irlande jusqu’à sa fin en 2013. Il répond ici à cinq questions posées au sujet du Brexit. Nous l’avons sollicité pour répondre à cette interview dans les jours qui ont suivit la victoire des partisans du Brexit, et nous le remercions vivement pour ses réponses.

Bretagne Infos.

I. QUELLES FORCES POLITIQUES ONT FAIT CAMPAGNE POUR LE ‘LEAVE’ EN IRLANDE DU NORD ?

Le 23 Juin 2016 l’éléctorat du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a été appellé à se prononcer pour savoir si le Royaume-Uni devait rester ou quitter l’Union Européenne. Le taux de participation a été important, avec 72.2% de participation de l’électorat. Quitter l’Union Européenne a remporté avec 51.9% des votes, contre 48.1% préférant rester. Les endroits où le vote en faveur de rester dans l’Union Européenne a été le plus élevé sont Londres, l’Écosse et l’Irlande du Nord.
En Irlande du Nord le vote en faveur de rester dans l’Union Européenne s’élevait à 55.8%, contre 44.2% pour la quitter. Tous les partis unionistes et groupes loyalistes à l’exception du parti unioniste UUP ont fait campagne pour sortir de l’Union Européenne. Les deux partis qui représentent la vaste majorité de l’éléctorat nationaliste, le SDLP et le Sinn Féin de Gerry Adams ont appellé à voter pour rester dans l’Union Européenne. L’Irlande du Nord est divisée en 18 circonscriptions électorales, et sur celles-ci 11 ont voté pour rester et 7 pour se retirer de l’Union Européenne. Sans surprises, toutes les 7 où le Brexit l’a emporté ont une majorité unioniste et la majorité des 11 qui ont voté pour rester une majorité nationaliste. Des estimations fiables estiment que 70% de l’électorat unioniste a voté Brexit et entre 80% et 90% de l’électorat nationaliste a voté pour rester dans l’Union Européenne. Les médias ont souligné l’ironie du fait que la vaste majorité des unionistes et des loyalistes ont voté pour ‘Brits Out’ (‘Anglais dehors’) alors que la vaste majorité des nationalistes ont voté ‘Brits In’.
La question du Brexit n’a pas suscité en Irlande du Nord les passions que ce débat a généré dans le restant du Royaume-Uni. Cela peut être illustré par le fait que seul 62.69% de l’électorat en Irlande du Nord a participé au référendum contre une moyenne nationale de 72.2%. L’Irlande du Nord est fortement représentée parmis les circonscriptions électorales où la participation a été la plus faible. Cela dit, ce référendum a vu en Irlande du Nord le plus haut taux de participation électorale depuis 1998. Pour prendre un exemple récent, lors des élections pour le parlement d’Irlande du Nord du 5 Mai 2016, le taux de participation électorale était de 54.9%. La diminution du taux de participation électorale en Irlande du Nord depuis 1998 est symptôme d’un climat général de dépoliticisation, mais cela n’explique qu’en partie l’indifférence de l’électorat pour la question de se prononcer si il faut sortir de l’Union Européenne. Il est important de souligner que les problèmes qui ont étés au centre du débat sur Brexit dans le reste du Royaume-Uni -l’immigration et la sécurité en particulier- ont une importance négligeable en Irlande du Nord. Ici l’immigration n’existe pas véritablement comme ‘problème’ et les gens n’ont pas la même motivation qu’ailleurs de voter pour freiner soi-disant les hordes migratoires à qui l’Union Européenne permettrait d’ “envahir” la Grande-Bretagne.
Car il faut souligner que dans le cadre général du Royaume-Uni ce sont les forces les plus rétrogrades qui ont dominé le débat sur le Brexit (Boris Johnson, Nigel Farrage etc), les forces anti-capitalistes ou anti-impérialistes avaient un poids marginal. Ceux qui appellaient à voter pour un retrait de l’Union Européenne sur base d’un ‘Lexit’ (‘Left Exit’ – sortir de l’Union Européenne sur la gauche) étaient une force très minoritaire. En Irlande du Nord les arguments en faveur du Brexit ont été en vaste majorité faits par des Unionistes et des Loyalistes sur base d’une nationalisme Anglo-Britannique rétrograde. Il y avait un courant minoritaire appellant à une sortie de l’Union Européenne sur une base anti-capitaliste et anti-impérialiste.

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Chez les républicains les plus visibles ont étés le parti socialiste républicain Éirígí (1) ou l’ex-prisonnier républicain et gréviste de la faim en 1980 Tommy McKearney (2). La gauche anti-capitaliste (mais non-indépendantiste) –People Before Profit- s’est également mobilisée pour un retrait sur cette base. Sur base des résultats, leurs consignes de votes n’ont eu aucun impact. Prenons l’exemple de la circonscription électorale de Belfast Ouest dans laquelle je réside. Lors des élections du 5 Mai 2016, Gerry Carroll le candidat de la gauche anti-capitaliste People Before Profit a été remarquablement élu en tête de liste avec 8299 votes loin devant le candidat du Sinn Féin arrivant en seconde place avec 4769 votes – ce sur un taux de participation de 56.7%. Gerry Carroll a appellé a voter pour une sortie de l’Union Européenne sur une base anti-capitaliste. Lors du référendum du 23 Juin 2016, la circonscription électorale de Belfast Ouest a voté 74.1% en faveur de rester dans l’Union Européenne contre 25.9% pour en sortir. Le taux de participation était de 48.9%, un des plus bas de l’ensemble du Royaume-Uni. Vu la faiblesse et le faible poids des forces ‘progressistes’ ce sont essentiellement les courants les plus rétrogrades qui vont profiter du Brexit. Ce n’est pas un ‘Lexit’ mais plutôt un ‘Rexit’ – une sortie de l’Union Européenne sur la droite.
D’ailleurs le plus notable depuis le résultat du référendum est une explosion d’attaques et d’agressions racistes. Selon certaines sources, ce genre d’attaques a augmenté par 57% durant les sept jours qui ont suivit la victoire du Brexit. (3) Le pire jour a été le 25 juin qui a vu une moyenne de 12 attaques par heure. Comparé à la même période en 2015, la période entre le 16 et le 30 juin a vu une augmentation de 42% d’agressions racistes dans le Royaume-Uni. (4) Les minorités raciales, étrangers résidant en Irlande du Nord témoignent d’une situation très tendue et qui s’est dégradée depuis le référendum. (5) Pour prendre un exemple que je connais, comme les médias l’ont rapporté, dans les jours suivant la victoire du Brexit, Mohammed Samaana, un camarade Palestinien travaillant comme infirmier dans un hôpital à Belfast a été insulté en public dans le centre ville de Belfast par des gens lui disant de “rentrer chez lui” (sic !) car le Brexit avait gagné – ce genre de choses n’était pas arrivé au cours des plus de 15 années pendant lesquelles il a travaillé ici. (6) Bernadette Devlin-McAliskey, figure historique de la résistance irlandaise opposée au processus de pacification et sans illusions dans l’Union Européenne ne peut célébrer le Brexit, car selon elle ce sont ce genre de tendances racistes, xénophobes et rétrogrades que Brexit encourage et nourrit. (7) Comme l’a rappellé Étienne Balibar, le Brexit est l’anti-Grexit. (8) Beaucoup de républicains croient que Brexit affaiblit l’impérialisme. (9) Mais mon avis est que ce ne sont pas les tendances anti-capitalistes et anti-impérialistes qui vont profiter du Brexit. Le principal gagnant est un nationalisme anglais rétrograde.

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Matériel de propagande de Eirigi

II. POURQUOI LE SINN FÉIN DIRIGÉ PAR GERRY ADAMS A-T-IL FAIT CAMPAGNE POUR LE REMAIN? PAR PUR OPPORTUNISME OU POUR AFFAIBLIR L’ÉTAT BRITANNIQUE OU PAR INTÉGRATION DE CE PARTI DANS UN ESPACE POLITIQUE NORMALISÉ ET SON ACCEPTATION DES VALEURS PRO-UE ?

D’un point de vue général, le parti de Gerry Adams est passé d’une position d’opposition à ce qui était la Communauté Européenne puis Union Européenne à une position d’ “engagement critique” et finalement à une position d’acceptation de l’Union Européenne avec certaines réserves. (10) Ce changement de positions est apparue pour Anthony Coughlan -principale figure publique opposée en Irlande au projet de construction européenne depuis les années ’60- comme étant un abandon de la perspective républicaine irlandaise traditionelle sur la construction de l’Europe du marché commun. (11)
Dans le cadre particulier de la question du Brexit, la position du parti de Gerry Adams a plus à voir avec le fait qu’une sortie du Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord représenterait un pas en arrière pour la stratégie du parti en Irlande. (12) Un pas en arrière pour trois raisons. Premièrement le parti de Gerry Adams croit que la marche vers l’unification de l’Irlande est inéluctable, et dans le cadre de la construction européenne la frontière et la partition de l’Irlande apparaissent comme un anachronisme. Une sortie de l’Union Européenne ne pourra que renforcer cette frontière et la partition de l’Irlande avec retour des postes de douanes, contrôles de police etc que l’Union Européenne est sensée dilluer. Deuxièmement les Accords du Vendredi Saint de 1998 ont incorporé d’importantes léglislations européennes relatives aux droits humains et l’égalité au niveau juridique. Le Brexit veut dire que ces conquêtes et les Accords de 1998 sont fragilisés ou remises en question. Troisièmement, l’Union Européenne est source de financements importants donnés dans le cadre du ‘processus de paix’. Les trois programmes PEACE de l’Union Européeenne ont donné de 1995 à 2015 €1.3 milliard à l’Irlande du Nord. Le programme PEACE IV a donné le 14 janvier 2016 encore €269 millions jusque en 2020.Ces financements vont par exemple pour des groupes d’ “ex-combattants”, d’anciens prisoniers républicains. Les financements que les militants du Sinn Féin ont obtenu de l’Union Européenne se comptent en millions d’Euro. (13) Le Brexit veut dire que la base du parti de Gerry Adams va perdre d’importantes sources de financements. Se prononcer en faveur d’un retrait de l’Union Européenne aurait été pour le parti de Gerry Adams scier la branche sur laquelle il est assis.

III. QUELLES PERSPECTIVES CONCRETES ENTRAINE CETTE VICTOIRE DU ‘LEAVE’ POUR LES PARTISANS D’UNE IRLANDE UNIE, ET PLUS CONCRETEMENT QUELLES PEUVENT ETRE LES CONSEQUENCES SUR LE PRETENDU PROCESSUS DE PAIX?

L’historien britannique John Newsinger avait décrit le processus de pacification comme étant la reconstruction de l’ordre bourgeois dans le cadre non de l’Empire Britannique, comme le traité de 1921,mais dans le cadre de l’Union Européenne. Les Accords de 1998 étaient construits sur l’idée que les États britannique et irlandais allaient continuer a faire partie de l’Union Européenne. Comme l’indique ma réponse à la question précédente tout un ensemble d’aspects juridiques incorporés dans les Accords de 1998 risquent d’être remis en question. Vu que ça retire l’aspect européen, le Brexit change le contexte dans lequel le processus de pacification se construit.
Les résultats du référendum sont une injection de réalité. Ils montrent que la frontière, la partition de l’Irlande sont toujours là et vont se renforcer. Le fait que Theresa Villiers, la Secrétaire d’État pour l’Irlande du Nord refuse de donner à l’Irlande du Nord ,le droit de négocier un statut spécial au sein de l’Union Européenne montre que le véritable pouvoir se trouve à Londres et non au sein de l’Assemblée d’Irlande du Nord, et que ce pouvoir se moque de ce que la majorité -55.8%- de l’électorat d’Irlande du Nord souhaite. (14)

IV. QUELLE EST L’IMPORTANCE DU DÉBAT SUR L’INDÉPENDANCE DE L’ÉCOSSE ET UN ÉVENTUEL RÉFÉRENDUM EN IRLANDE?

Avec 62% en faveur de rester dans l’Union Européenne, l’Écosse a eu le taux le plus élevé du Royaume-Uni de l’électorat pour ‘remain’. Suite à la victoire du Brexit, le Premier Ministre de l’Écosse Nicola Sturgeon parle d’organiser un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Écosse si la Grande Bretagne sort de l’Union Européenne.

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Si la question de l’indépendance de l’Écosse accentue la crise de l’État britannique, un référendum en Écosse est quelque chose de très différent qu’un référendum en Irlande. Les paramètres et préconditions pour un référendum sur la réunification possible de l’Irlande sont entièrement déterminés par l’État britannique, alors que les écossais peuvent décider quand ils veulent un référendum et quelles sont les questions posées. En vertu des Accords de 1998, un référendum sur la réunification de l’Irlande ne peut avoir lieu qu’une fois tous les sept ans. L’unité irlandaise se produit si cette option est soutenue par une majorité en Irlande du Nord et une majorité en République d’Irlande dans un référendum séparé. Très important, dans le cadre de l’Écosse il n’y a pas de controverses sur l’unité légitime pour l’autodétermination, alors que considérer les six comtés que comprend l’Irlande du Nord comme l’unité légitime pour l’autodétermination a peu de raison d’être politiquement, géographiquement ou historiquement. Les républicains diront que l’unité légitime sont les 32 comtés de l’Irlande, pas deux référendums séparés dans deux entités de 6 et 26 comtés basés sur des questions différentes. En Irlande l’unité pour l’autodétermination -et donc la démocratie- est fracturée, mais pas en Écosse. Les choses sont aussi compliquées par le fait que l’ancien Taoiseach (Premier Ministre) du gouverement de Dublin Bertie Ahern (qui avait négocié les Accords de 1998) a déclaré qu’une simple majorité -51% par exemple- ne serait pas suffisante pour une Irlande unie. (15) Les paramètres et préconditions pour un référendum sur la réunification possible de l’Irlande sont entièrement déterminés par l’État britannique. En vertu de la législation actuelle (Schedule 1 of the 1998 Northern Ireland Act), le gouvernement britannique par le biais de son Secrétaire d’État décrète que premièrement lui seul peut ou non faire appel à un référendum, deuxièmement décider de “la ou les questions qui doivent être posées”, et troisièmement n’organiser un référendum que si le Secrétaire d’État estime qu’il est probable “que la majorité des votants exprimerait le souhait que l’Irlande du Nord devrait cesser de faire partie du Royaume-Uni et faire partie d’une Irlande unie.” Après le référendum sur Brexit, le Secrétaire d’État à l’Irlande du Nord a exclu un référendum sur une Irlande unie sur base qu’un changement n’est pas susceptible d’être approuvé. L’opposition à un référendum sur la réunification de l’Irlande a aussi été exprimée ces derniers jours par le Premier Ministre du Royaume-Uni David Cameron et le Taoiseach (Premier Ministre) du gouvernement de Dublin Enda Kenny et son Ministre des Affaires Étrangères Charlie Flanagan. (16)

V. COMBIEN DE PERSONNES SONT DÉTENUES EN IRLANDE ACTUELLEMENT DANS LE CADRE DU CONFLIT ?

La libération anticipée des prisonniers suite aux Accords de 1998 pourrait donner l’impression que ce sujet est à présent résolu. Mais le problème est que il continue à y avoir des prisonniers républicains, même si ils sont beaucoup moins nombreux que durant la période 1969-1998. Environs 300 républicains ont été emprisonnés entre 1999 et 2009 au sud et au nord de l’Irlande, en Angleterre et ailleurs. Selon les statistiques fournies par les autorités pénales, fin 2015 il y avait un total de 54 républicains emprisonnés à Roe House dans la prison de Maghaberry en Irlande du Nord et environs 40 dans la prison de Portlaoise dans le sud de l’Irlande. Au moins quatre de ces prisonniers sont condamnés à perpétuité, parmis eux les ‘deux de Craigavon’. Ceux-ci sont emprisonnés à vie pour avoir tué un gendarme en 2009, mails il y a de sérieuses raisons de penser qu’ils sont innocents et une campagne importante a été mise en place pour les innocenter. Dans certains cas, comme actuellement celui de Tony Taylor, les républicains sont emprisonnés sans accusation ni procès. Dans le nord fin 2015 il y avait aussi 53 loyalistes incarcérés à Bush House dans le prison de Maghaberry mais pour des délits de droits commun (traffic de drogues etc) Dans le nord, les prisonniers politiques représentent actuellement environs 3.5% de la population carcérale qui s’élève aujourd’hui à 1507 détenus. Les prisonniers ‘sociaux’ sont beaucoup plus nombreux que les ‘politiques’ vu que l’Irlande du Nord a le plus haut taux du Royaume-Uni de gens en prison pour non-paiement de dettes. L’État britannique a décidé d’abolir tous les gains et privilèges obtenus dans les luttes carcérales durant le conflit et de traiter les républicains emprisonnés après les Accords de 1998 comme des criminels ordinaires. Cela a donné lieu à une série de luttes depuis 1999. Comme durant les années ’70, les prisonniers républicains ont mené une grève de l’hygiène du 4 avril au 12 août 2010 et du 6 mai 2011 au 20 novembre 2012 pour protester contre le fait d’être bloqué en cellule 23 heures par jour et les fouilles corporelles brutales. Le système carcéral n’a pas subit de réformes après 1998, et en 2011, une commission officielle a admit que le régime carcéral en Irlande du Nord était “ oppressif ”. Si en Grande Bretagne il y en moyenne trois gardiens pour 12 prisonniers, en Irlande du Nord la moyenne est de cinq gardiens pour trois prisonniers, soit six fois plus. Dans le cadre de cette situation, les républicains ont éxécuté deux gardiens de prison, le 1 Novembre 2012 et le 4 Mars 2016. La situation des prisonniers occupe une part très importante (disproportionnée peut-être) des activités des organisations républicaines opposées au processus de pacification.

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NOTES

(1) Gerry Moriarty, Éirígí backs Brexit with Northern Ireland poster campaign, Irish Times, 30 May 2016
(2) Rodney Edwards, What Brexit means for ex-hunger striker Tommy McKearney, Irish Times, 30 June 2016
(3) Peter Geoghean, Brexit result triggers wave of hate crimes in UK, Irish Times, 1 July 2016
(4) Hayden Smith, Police faced big spike in hate crimes in June, Belfast Telegraph, 9 July 2016
(5) Amanda Ferguson, Ethnic minorities in NI warn of rise in racist abuse since Leave vote, Irish Times, 28 June 2016
(6) Jonny Bell, Belfast nurse told ‘You from the EU? F*** off back to your country’ during night out in city, Belfast Telegraph, 28 June 2016
(7) Gerry Moriarty, Brexit campaign in North ‘played on racism and emotions’, Irish Times, 1 July 2016
(8) Étienne Balibar, Le Brexit, cet anti-Grexit, Libération, 27 Juin 2016
(9) British referendum result weakens old and new imperialism, Saoirse, July 2016
(10) Agnès Maillot (2009), Sinn Féin’s Approach to the EU: Still More ‘Critical’ than ‘Engaged’?, Irish Political Studies, 24:4, 559-574
(11) Anthony Coughlan, Sinn Féin goes Republican Lite on Brexit, Village Magazine, 20 June 2016
(12) Sarah Bardon, Sinn Féin to campaign against Brexit in EU referendum, Irish Times, 24 December 2015
(13) Maeve Sheehan, Ex-prisoners and dissidents share in €333m EU peace cash bonanza, Irish Independent, 24 January 2016
(14) Neither Holyrood nor Stormont could block Brexit, insists Theresa Villiers, Belfast Telegraph, 26 June 2016
(15) Laurence White, 51% majority not enough for Irish unity: Ahern, Belfast Telegraph, 20 November 2008
(16) John Manley, Sinn Féin call on border poll rejected, Irish News, 25 June 2016

Peggy O’Hara zo aet da anaon d’ar yaou 16 a viz Gouere e Derry,  e norzh Iwerzhon, d’an oad a 84 bloaz.

Brudet e oa dreist-holl evit bezañ roet buhez da bPatsy O’Hara. He mab a oa bet an eil eus an 10 merzher republikan a varvas diwar harz-debriñ. Yuniñ a reas e-pad 61 devezhiad da gaout ur statud a brizoniad politikel.

Tra-mor n’eo ket ken brudet eget Bobby Sands dreist-holl peogwir e oa ezel Patsy eus an INLA (Irish National Liberation Army), komunourien ha sokialourien radikal ar republikaned.

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E vamm avat, Peggy, a oa chomet feal a-hed he buhez goude marv he mab d’ar mennozhioù sokialour ha dizalc’hour a oa re an INLA hag e strollad foran : an IRSP (Strollad Republikan ha Sokialour Iwerzhon).

Brudet e oa evit bezañ aliet d’ar mammoù all a oa o mibien o yuniñ da chom hep klask kendrec’hiñ anezho da chom a-sav gant an harz-debriñ.

Derc’hel a reas Peggy O’Hara a-hed ar bloavezhioù betek n’eus ket pell zo gant ar mennozhioù dispac’hel a oa bet re he mab hag e genseurted hag a embanne bezañ hered stourm James Connoly.

E 2007 ec’h en em ginnigas evel republikanez « dizalc’h » hep kuzhaat ar pezh a soñje diwar-benn emglev  peoc’h ar gwener mat, disrann padus an enezenn , ar polis nevez. Ne oa ket bet  dilennet. D’ar c’houlz se ez eo tost da 300 den bet toull-bac’het d’ur mare pe d’un all, evit strollad-mañ strollad o devoa galvet a zevri da vouezhiañ eviti.

Hec’h interamant bet dalc’het d’ar sadorn 18 a viz Gouere zo bet arouezhius eus he buhez stourm ha poan. A-raok ma kuitaje an arched he zi e Buncrana Road e Derry e oa deuet ouzhpenn d’ar c’hantadoù a annezidi ur bagadig soudarded kuzhet o fas da dennañ taolioù fuzuilh war-zu an oabl, a-benn rentañ enor dezhi e-giz ma rae ar republikaned er bloavezhioù emgann.

Peggy Ohara

Tost da hanter-kant den, gwazed ha merc’hed, ur skerb du war o fas, o doa graet an hent betek ar vered evit diskouezh n’eo ket bet ankouaet gant an INLA pegen skouerius e oa bet Peggy O’Hara a-hed he buhez a stourmerez, moarvat ivez da zegas da soñj d’an holl e chom da dizhout pal politikel merzherien Long Kesh.

Trouz zo bet er c’hazetennoù, gant al lealourien hag ar polis gant kement a skeudennoù a ziskouezh splann n’eo ket e peoc’h c’hoazh an enezenn c’hlas, dreist-holl p ‘emañ an INLA o kemer perzh en harz-brezel hervez-kont !

An holl republikaned radikal (IRSP, CSM 32, Republican Sinn Fein…) a oa deuet d’an obidoù evit kimiadiñ diouzh Peggy O’Hara int ivez daoust d’an disemglevioù politikel a zo kenetreze, kement-se zo gwir ivez evit ar Sinn Fein « bras » (hini Gerry Adams) koulz hag an SDLP o deus rentet enor dezhi ha lâret kenavo da viken d’ar vaouez, d’ar stourmerez ha d’ar vamm he doa servijet en un doare kalonek ha ken feal, hep plegañ, stourm ar brizonidi politikel hag hini Iwerzhon, dieub, unvan ha sokialour.

savederry

Nous reproduisons ici, à quelques jours de la célébration de la journée  de lutte internationale des femmes, un texte traduit par le collectif parisien “Libération Irlande“. Ce collectif de solidarité avec le mouvement républicain Irlandais le plus radical semble en sommeil, toutefois grâce à eux de nombreux textes des différentes factions du républicanisme Irlandais sont disponibles pour les lecteurs francophones.

Le texte “Féminisme et républicanisme irlandais” retrace la place supposée de la femme dans l’Irlande au moyen-âge mais surtout narre la genèse de la rencontre entre mouvement de libération nationale Irlandais, mouvement ouvrier et lutte féministe dans l’Irlande du 20eme siècle.

Bien qu’un peu daté ce texte montre bien le lien entre lutte pour l’autodétermination et émancipation féministe. Comme le rappelle une autre militante républicaine Irlandaise dans un autre texte  (jette ton tablier et prendre les armes ! ) :

La lutte pour l’auto-détermination de l’Irlande ne peut être séparée de « l’auto-détermination des femmes

« Le concept d’auto-détermination est à mon avis ce qui définit le mieux le féminisme républicain. Ce concept est sans doute mieux connu sous son aspect nationaliste que féministe, mais il a clairement un sens féministe aussi. L’auto-détermination, c’est le droit et la capacité de faire des choix véritables sur ce qui touche à nos vies : notre fécondité, notre sexualité, le soin et l’éducation des enfants, les moyens d’être indépendante, et tous les domaines dans lesquels on nous prive d’autonomie et de dignité, dans les différentes facettes de notre identité de femmes. »

Ce lien nous semble universel et non spécifiquement Irlandais , et donc valable dans la perspective de la  lutte pour une république bretonne  indépendante , réunifiée, brittophone, socialiste,  antipatriarcale, combat dont nous sommes partie prenante.

La rédaction de Bretagne-info.

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Voici un texte intéressant, écrit par Jan Cannavan probablement au début des années 1990, intitulé Women’s struggle liberates Ireland/Ireland’s struggle liberates women : feminism and irish republicanism. La faiblesse de ce texte, très favorable aux Provisoires ( NDLR = Le Sinn Fein de Gerry Adams ) , est une idéalisation du mouvement républicain et une absence d’autocritique, néanmoins il est assez instructif.

Depuis la deuxième vague du féminisme au début du mouvement contre la Guerre du Vietnam, des femmes ont débattu dans le monde entier de la compatibilité entre libération nationale et libération des femmes. Les questions dominantes étaient celles-ci : lequel de ces deux mouvements est-il davantage susceptible de libérer les femmes? Et si les deux sont nécessaires, comment pourraient-ils coexister? Qu’en est-il des autres oppressions que subissent les femmes, à savoir l’oppression de classe et l’oppression de race?

Cet article examinera ces questions à la lumière du cas irlandais, placera la libération nationale et la libération des femmes dans leur contexte historique propre et décrira la condition sociale et économique des femmes d’Irlande aujourd’hui. Pour finir, il comparera les voies de la libération des femmes telles qu’elles sont définies par les féministes d’une part et les républicaines irlandaises d’autre part.

La colonisation de l’Irlande par la Grande-Bretagne commença avec l’invasion anglo-normande de 1169, qui fut accomplie vers 1652 sous Cromwell. Le gouvernement britannique expulsa les Irlandais indigènes de leurs terres et posa à leur place des colons-planteurs loyaux. Les Irlandais indigènes furent gouvernés par les Lois Pénales, un code d’apartheid qui les empêchait de posséder des terres ou des chevaux, de pratiquer leur religion, de participer au gouvernement ou d’éduquer leurs enfants.

Cette répression fit naître des sociétés secrètes et des révoltes agraires à chaque génération. Beaucoup de planteurs presbytériens sympathisaient avec les doléances des indigènes catholiques, étant donné qu’ils étaient presqu’aussi opprimés par la loi de l’administration coloniale qui restreignait le commerce et maintenait délibérément l’Irlande dans le sous-développement.

Suivant les exemples des révolutions américaines et françaises, les éléments insatisfaits du pays se réunirent dans les Irlandais Unis – United Irishmen, un mouvement pour une République irlandaise indépendante. Après beaucoup de soulèvements manqués, ce but fut partiellement réalisé en 1921 avec l’octroi d’une indépendance limitée pour 26 comtés des 32 comtés d’Irlande.

Toutefois, les républicains irlandais, et avec eux la majorité des nationalistes, n’acceptèrent jamais la partition de l’Irlande et combattent encore pour une Irlande unie et socialiste.

Les femmes irlandaises ont vu le destin de leur libération en tant que genre entrelacé avec celui de leur nation. Dans l’Irlande celtique avant la conquête, les femmes jouissaient de beaucoup de droits légaux, d’un niveau tel qu’il n’est pas atteint dans la plupart des pays aujourd’hui. Les femmes gardaient leur propriété même dans le mariage, et aucun des partenaires ne pouvait passer contrat ou faire des affaires sans le consentement de l’autre.

Aussi bien l’époux que l’épouse pouvait divorcer pour un grand éventail de raisons, une femme par exemple pouvait divorcer de son mari pour quatorze raisons, dont la diffamation à son encontre ou le manque d’harmonie sexuelle. Les femmes étaient protégées hors du mariage, en ce qui regarde le droit commun et les relations de passage et ainsi, aucun enfant n’était considéré comme illégitime.

La conquête britannique mit fin au système légal indépendant et supprima la plupart des droits traditionnels des femmes irlandaises. Il apporta également un nouveau sens de la pudibonderie, qui ne faisait pas partie de la culture irlandaise. On voit encore dans les ruines de certaines églises datant d’avant la conquête des bas-reliefs montrant des sile-na-gigs, des formes féminines nues aux organes génitaux très exposés, avec de fréquentes scènes de masturbation.

Une tradition celtique à laquelle la conquête n’a pas mis fin fut l’existence et l’acceptation de femmes fortes et guerrières. Dans la saga principale de l’Irlande, Tain bo Cuailgne [traduction française : ‘La razzia de Cualngé’, pp. 91-116, in L’épopée irlandaise, trad. Georges Dottin, col. L’arbre double, ed. les presses d’aujourd’hui, 1980], la reine guerrière Mêve mène son armée à la victoire, noyant l’armée adverse sous un flot d’urine et de sang menstruel.

A l’époque de la reine Elisabeth d’Angleterre, Grainne Mhaol menait son clan dans des attaques pirates contre les vaisseaux britanniques, pour finir par négocier en tant qu’égale avec la reine. Dans toutes les rébellions irlandaises, les femmes combattirent aux côtés des hommes et prirent part à toutes les activités. Mais la plus grande partie de cette histoire des femmes a été obscurcie et n’est redécouverte que depuis peu. Par exemple, les récits d’époque de la rébellion de 1798 enregistrent beaucoup d’actions menées par des femmes, mais les historiens qui sont venus par la suite ont négligé tous ces épisodes.

Des revendications féministes ont accompagné les luttes nationalistes, depuis au moins 1798. Mary Ann McCracken, une des Irlandaises Unies – United Irishwomen, était une admiratrice de Mary Wollstonecraft. Avant de rejoindre la société des Irlandaises Unies, elle écrivit à une amie emprisonnée qu’elle souhaitait « savoir si elles avaient une idée rationnelle de la liberté et de l’égalité pour elles-mêmes, ou bien si elles se contentaient de leur condition abjecte et dépendante, avilie par la coutume et l’éducation en-dessous du rang social où elles étaient placées à l’origine. »

Au moment du Soulèvement de Pâques 1916, trois mouvements avaient uni leurs forces pour profiter de l’occasion offerte par les préoccupations britanniques en pleine Guerre Mondiale : le mouvement nationaliste, le mouvement ouvrier et le mouvement des femmes. Cette alliance signifiait qu’un programme progressiste pour les travailleurs et les femmes accompagnait les exigences de libération nationale. James Connolly, qui était un théoricien socialiste et un des dirigeants exécutés de la rébellion, soutenait le mouvement pour le suffrage féminin. En 1915, il écrivit : « L’ouvrier est l’esclave de la société capitaliste, l’ouvrière est l’esclave de cet esclave ».

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Et lorsqu’en 1918 les républicains remportèrent la victoire électorale dans toute l’Irlande et mirent sur pied leur propre parlement, Constance Markievicz, une des dirigeantes de 1916, fut nommée Ministre du Travail. Elle et Alexandra Kollontaï en Union Soviétique furent les première femmes occupant le poste de ministre.

La partition de l’Irlande et la guerre civile qui s’ensuivit déboucha sur la victoire des forces pro-britanniques et conservatrices. Dans les années 1930, beaucoup de leaders radicaux combattirent et tombèrent pour la République espagnole. Ceci ouvrit la voie à la constitution irlandaise de 1937, dont l’article 41 stipule que « par sa vie menée dans son foyer, la femmes donne à l’Etat un soutien sans lequel le bien commun ne peut pas être atteint. »

A la fin des années 1960, la Northern Ireland Civil Rights Association – Association pour les Droits Civils d’Irlande du Nord, inspirée par le mouvement pour les droits civils des Afro-américains, engagea une lutte non-violente pour que les catholiques nationalistes des six comtés obtiennent des droits égaux. Il y avait une grande proportion de femmes dans ce mouvement, mais la direction était entièrement masculine, à l’exception de Bernadette Devlin.

Lorsque les manifestations pacifiques rencontrèrent la répression violente et les coups de feu (processus culminant avec le Bloody Sunday, qui vit les parachutistes tuer quatorze manifestants désarmés), la lutte armée recommença.

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De même, au début des années 1970, un mouvement des femmes émergeait à Dublin, inspiré par ce qui existait aux Etats-Unis et dans d’autres pays européens. Les féministes irlandaises faisaient de l’agitation pour que soit réformé le système social, en faveur des mères seules, en faveur d’un traitement égal en matière d’emploi, de salaire et d’éducation, ainsi qu’en faveur du droit au divorce et à la contraception. L’une de leurs premières actions fut de prendre le ‘train de la contraception’ vers Belfast, en mai 1971.

Depuis que la contraception fut légalisée en Irlande du Nord, 47 femmes y allèrent et ramenèrent de grandes quantités de contraceptifs, qu’elles déclarèrent ouvertement aux douanes irlandaises à leur retour. Cette action attira dans une grande mesure l’attention des médias et déclencha une grande campagne, qui déboucha sur la légalisation partielle de la contraception.

En 1975, le Mouvement pour les Droits des Femmes d’Irlande du Nord – Northern Ireland Women’s Rights Movement (NIWRM) fut fondé à Belfast, exigeant la parité avec la Grande Bretagne en ce qui concerne les droits des femmes. Ce mouvement était légaliste, avec comme bases les classe moyennes, et ne prenait pas position sur les questions qui concernaient les femmes du peuple et les femmes nationalistes. L’année suivante, lorsque le NIWRM critiqua le Troops Out Movement – Mouvement pour l’expulsion des troupes britanniques, un Groupe de Femmes Socialistes – Socialist Women’s Group, fit sécession.

Puis, en 1977, ce dernier groupe scissionna, donnant naissance au Belfast Women’s Collective – Collectif des Femmes de Belfast, qui fut formé pour travailler de façon plus rapprochée avec le mouvement républicain, en particulier au sujet des femmes emprisonnées. Une nouvelle scission survint, qui produisit en 1978 le groupe Women Against Imperialism – Femmes Contre l’Impérialisme, qui était lié de façon encore plus étroite avec les républicains. La centralité de la lutte nationale et la polarisation des positions à ce sujet empêcha le développement d’un mouvement féministe unifié au Nord de l’Irlande.

Pour comprendre la condition féminine en Irlande, il faut connaître un peu la société irlandaise et ses conditions économiques. Les six comtés occupés de l’Irlande du Nord forment une colonie britannique, dirigée directement depuis Londres. Les 26 comtés du Sud sont une néo-colonie, formellement indépendante mais ayant une économie complètement dominée par les investisseurs multinationaux. En termes économiques, l’Irlande est un pays du tiers-monde. Officiellement, le taux de chômage dans les deux parties de l’Irlande dépasse les 17%. Mais dans certains quartiers populaires, il est de plus de 80%. Politiquement, les deux parties de l’Irlande sont des Etats confessionnels conservateurs.

Le Sud est dominé par l’Eglise catholique, et le Nord par un protestantisme fondamentaliste. Les deux Etats sont extrêmement conservateurs en matière sociale, et les deux emploient des mesures répressives et la censure pour maintenir l’ordre établi. Ces conditions économiques et sociales ont un lourd impact sur les femmes. Bien que davantage de femmes soient entrées sur le marché du travail ces dernières années, ces emplois se concentrent dans les industries de service. Les femmes dans les 26 comtés gagent seulement 60% du salaire masculin, dans les 6 comtés, 75,5%. Plus de 1,25 million de femmes irlandaises (c’est-à-dire la moitié de la population féminine) est considérée comme vivant dans la pauvreté.

Les conditions d’existence des femmes, dans ces sociétés caractérisées par des liens puissants unissant les églises et les Etats, n’ont pas connu d’amélioration significative depuis le début des années 1970.

Les contraceptifs peuvent désormais être prescrits dans les 26 comtés, mais beaucoup de médecins et de pharmaciens, surtout dans les zones rurales, refusent de les donner. Les préservatifs ne peuvent être vendus qu’en pharmacie, un magasin de Dublin qui tenta d’outrepasser cette règle fut conduit devant les tribunaux et condamné, en 1990. L’avortement, qui a toujours été illégal en Irlande, fut rendu anti-constitutionnel lors d’un référendum en 1983. Même l’accompagnement non-directif de la grossesse, avec l’option de se faire avorter en Grande Bretagne, est illégal.

Dans le Nord, l’avortement est illégal également, même si l’Irlande du Nord est censée être partie intégrante de la Grande Bretagne. Le divorce est encore illégal dans les 26 comtés, même si une campagne pour un nouveau référendum à ce sujet se développe. En Irlande du Nord, les femmes doivent faire face aux soldats armés dans leurs rues, aux raids constants dans les maisons, aux fouilles corporelles et au fait de devoir s’occuper seules de leurs familles quand les époux sont en prison ou en cavale

Les féministes et les républicaines féministes proposent des solutions différentes au problème de l’oppression des femmes. Le mouvement féministe, qui appartient largement aux classes moyennes, voit une issue dans le travail en direction de l’égalité et de la neutralité en matière de genres, à l’intérieur du système légal existant. La Commission pour un Statut des Femmes, un organisme délibératif soutenu par le gouvernement, suggéra beaucoup de pistes de changement en matière d’emploi et de lois sociales, qui résorberaient certaines des inégalités les plus criantes.

Beaucoup de féministes considèrent qu’il faut des actes qui aillent au-delà de la simple égalité formelle, comme des crèches et des possibilités de contrôler leur propre fertilité, en tant que conditions pré-requises pour l’égalité. Des campagnes axées sur ces points particuliers ont été et sont menées par les groupes féministes. Les groupes culturels de femmes, comme des ateliers d’écriture, de thérapie de groupe, de sport, etc. sont considérés par nombre d’entre elles comme « un environnement alternatif au sein duquel les femmes peuvent explorer des idées et se soutenir les unes les autres, loin des contraintes imposées par les structures patriarcales. »

Les féministes républicaines considèrent que cette approche est trop fragmentaire et qu’elle s’attaque aux symptômes et non aux causes des problèmes des femmes, qu’elles identifient comme étant le capitalisme et l’impérialisme britannique, en même temps que le patriarcat. Comme le dit Mary Nelis, une activiste Sinn Fein [provisoire] de Derry : « Le système patriarcal, avec ses sous-produits l’impérialisme et le capitalisme, peut se permettre des réformes et peut même permettre à des femmes d’être des figures de proue du pouvoir (par exemple Maggie Thatcher), pourvu que les règles fondamentales établissant l’inégalité essentielle restent intactes. »

La fragmentation en une multitude groupes se préoccupant chacun d’un aspect particulier et intriguant les uns contre les autres pour obtenir des fonds et de la considération, est vue par les féministes républicaines comme une chute « dans le vieux piège de diviser pour régner ». Elles considèrent également que l’appareil d’Etat a dans une certaine mesure absorbé le mouvement des femmes. Les féministes les plus acceptables sont désormais partie prenante de l’establishment et passent à loisir à la radio, ce qui nous est interdit, à nous autre républicaines, par la loi section 31 (loi censurant l’expression du républicanisme dans les 26 comtés).

Dans ces conditions, où est le véritable danger?

Nell McCafferty, journaliste féministe dont les travaux sont connus dans le monde entier, s’était mise hors la loi pendant des années au nom du droit des femmes à la contraception, et avait raconté ses « activités criminelles ». Comme elle le disait : « Cela n’a pas du tout nui à ma carrière. » Sauf qu’un jour, dans une interview, elle déclara soutenir l’IRA. Et là, elle fut séance tenante bannie de la radio irlandaise.

Voyons maintenant les objections adressées à la lutte républicaine par les féministes. Elles tombent en général sous ces trois catégories. 1. c’est une guerre d’hommes; 2. les femmes devraient se concentrer sur leur propre libération en tant que femmes; 3. ce conflit est différent des luttes légitimes dans le tiers-monde.

Cathy Harkin, du Derry Women’s Aid, un refuge pour femmes battues, met en avant la première objection. Elle identifie la ville de Derry comme un « patriarcat armé » et dit que les femmes dans le mouvement républicain ont rarement eu accès à des positions d’autorité sauf lorsqu’elles adoptent les idéaux, les buts et la discipline masculine du mouvement. »

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Cet argument, qui a fait débat pendant des années dans les cercles féministes, présuppose que les femmes sont « naturellement » pacifistes et que toute femme qui prend partie dans une lutte qui inclut une composante militaire ne peut aller que contre sa véritable nature et ne fait que suivre les hommes.

Suivre un tel argument, c’est suivre une pente dangereuse pour les femmes, parce que la théorie des « différences » biologiques et psychologiques a été utilisée contre les femmes pendant toute l’histoire du patriarcat. En outre, comme une volontaire de l’IRA l’a affirmé : « Ce n’est pas une guerre des hommes, c’est une guerre du peuple. »

Margaret Ward, historienne féministe, soulève la deuxième objection. Elle demande : « Le féminisme peut-il offrir un tel soutien sans qualification (à la libération nationale) tout en restreignant ainsi sa capacité à saisir la réalité de l’oppression de toutes les femmes et à combattre sans compromis pour les intérêts des femmes? »

Cette critique soulève deux questions : 1. quels sont les problèmes des femmes? Et 2. est-ce que le mouvement républicain irlandais combat pour les résoudre?

A la première question, les prisonnières de guerre irlandaises ont répondu ceci : « les femmes qui vivent dans les six comtés occupés d’Irlande sont opprimées à la fois par un Etat impérialiste étranger et pat les idéologies sexistes qui répriment les femmes dans le monde entier ».

Quant à Bernadette Devlin McAliskey, elle a ajouté que « nous ne sommes pas opprimées seulement parce que nous sommes des femmes, mais aussi parce que nous sommes des femmes de la classe ouvrière, et enfin parce que nous sommes des femmes républicaines de la classe ouvrière ». Comme le remarque une activiste de Sinn Fein [provisoire] : « Ce n’est pas parce qu’un problème affecte les hommes qu’il n’affecte pas aussi les femmes ».

Mais qu’en est-il des problèmes qui concernent spécifiquement les intérêts des femmes? Est-ce que le mouvement républicain les prend aussi en compte dans son combat? Sinn Fein [provisoire] a produit un document approfondi qui explique ses positions en ce qui concerne les questions féminines. Il prend parti, entre autres, pour le divorce légal, pour une contraception libre et accessible, pour un conseil en matière de grossesse incluant tous les choix, pour la prise en charge de l’enfant par les deux parents, pour des crèches ouvertes 24h/24, et pour mettre fin aux rôles stéréotypés dans l’éducation et la publicité. En outre, de membres de Sinn Fein [provisoire] sont actifs dans les centres pour femmes et dans les campagnes pour le divorce, pour le planning familial, contre le viol et la violence conjugale.

La troisième objection adressée au républicanisme, qui consiste à dire qu’il ne s’agit pas d’un véritable mouvement du tiers-monde, a déjà été traitée dans cet article, au sujet du statut économique du pays, qui est celui d’un pays du tiers-monde. Beaucoup de gens se plaisent davantage à soutenir des mouvement de libération loin de chez eux, menés par des gens qui ne leur ressemblent pas physiquement ou parlent une autre langue, plutôt qu’un mouvement plus proche de leurs foyers.

La distance et le soupçon mutuel entre les mouvements féministes et républicains nuisent aux deux mouvements et à la libération des femmes en général. Comme l’explique la coordinatrice du Centre des Femmes de Falls Road [à Belfast-ouest] : « La droite n’a pas de problèmes lorsqu’il s’agit de s’unir pour défendre ses intérêts, en utilisant les distortions créées par l’impérialisme britannique pour nous diviser et dévier nos forces ». L’incapacité du mouvement des femmes à s’opposer réellement au courant conservateur actuel est attribué par Marron à « ce fractionnisme et cette peur ».

Aussi bien le mouvement féministe que le mouvement républicain ont beaucoup à offrir l’un à l’autre et au peuple irlandais.

D’après Nell McCafferty : « Jusqu’à aujourd’hui, il s’est avéré qu’il était plus facile de féminiser les républicains, qui ont beaucoup à gagner de l’inclusion des femmes dans la lutte, que de républicaniser les féministes, qui ont beaucoup à perdre si les intérêts des femmes sont totalement subordonnés à la résolution de la guerre.

Toutefois, l’expérience a montré que les luttes et révoltes sociales dans le monde n’ont été forcées de prendre des mesures pour résoudre les problèmes sexistes que lorsque le mouvement des femmes s’y est impliqué. (…) Le mouvement des femmes en Irlande fait face au défi de développer une théorie et une pratique au sujet du féminisme et de la guerre. L’implication active des femmes est impérative si les femmes doivent avoir, une fois la guerre résolue, la même liberté que les hommes libres. »