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Le bimensuel Suisse “SolidaritéS” qui se définit comme socialiste, féministe, écologiste a interviewé Anna Gabriel Sabaté militante féministe et indépendantiste catalane exilée en Confédération Helvétique en raison du risque de poursuite par l’Espagne pour l’organisation du référendum d’indépendance en Catalogne. En ce moment de nombreux dirigeants indépendantistes catalans sont jugés et risquent de lourdes peines à Madrid pour ce faits. Nous reproduisons ici cet interview d’actualité.

Bretagne Info.

Anna Gabriel à Nantes en Bretagne il y a quelques années.

Notre rédaction s’est entretenue avec Anna Gabriel, ancienne députée de la Candidature d’unité populaire (CUP) au Parlement de Catalogne, au sujet des procès qui se sont ouverts contre les représentant·e·s institutionnel·le·s du gouvernement Catalan pour sédition.

Dix représentant·e·s du gouvernement Catalan et deux porte-paroles des mouvements sociaux (Assemblée Nationale Catalane et Omnium Cultural), en prison depuis une année, sont appelé·e·s à comparaître depuis le 12 février. Pourquoi ce procès ?

Le Procureur général de l’État espagnol a déposé une plainte pénale à l’encontre du gouvernement et de l’ensemble du Bureau du Parlement de Catalogne. Ils·elles sont accus·é·s de rébellion et de sédition. Les deux Présidents de l’ANC et d’Omnium Cultural, associations qui comptent 160 000 membres, sont emprisonnés depuis le 16 octobre dernier au motif qu’ils auraient pu inviter la population à une mobilisation ; un appel jugé criminel par le Procureur de l’État espagnol.

Le parti d’extrême droite Vox, récemment élu au sein du Parlement andalou fait partie de l’accusation. Placé aux côtés des avocats de l’État, il demande 74 ans de prison pour les prisonniers·ères politiques. Vox, fort de son récent succès, a été invité cette semaine au Parlement européen par le parti « Loi et Justice » de Hongrie qui soutient littéralement que «l’immigration peut amener en Europe des pandémies» ou encore que la loi contre les violences de genre doit être abrogée.

Ce procès signifie la défaite de la société civile. Il est la conséquence de l’irresponsabilité de nombreux·euses dirigeant·e·s politiques de l’État espagnol, qui déclarent depuis des décennies que l’unité de l’Espagne ne peut pas être remise en cause. Donc, ce procès est un non-sens. C’est pourquoi certain·e·s défenseurs·euses, certain·e·s accusé·e·s, ont clairement déclaré vouloir accuser l’État de violations des droits fondamentaux perpétrées au nom de l’unité de l’Espagne.

Et maintenant, que faire ?

Il faut continuer à défendre la lutte pour les droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques, car elle en vaut plus que jamais la peine. Continuer à nous battre, car pour l’instant aucun argument raisonnable n’a été avancé qui indique qu’un référendum n’est pas un bon moyen de connaître le véritable appui de la population à l’indépendance de la Catalogne ; une confrontation indispensable avec l’État espagnol que la CUP articule avec la nécessité de proposer des alternatives économiques au système actuel.

Dans le cadre de la monarchie parlementaire, de par la genèse-même de l’État espagnol – et cela nécessiterait une analyse approfondie – il y a peu d’options pour la création d’un système économique plus juste et générant moins d’inégalités. Les partis de gauche ont trop souvent relégué la question de l’indépendance à un addendum de leur lutte politique et sociale. Notre alliance avec eux passe par la reconnaissance de l’exigence de fonder la république, qui est le meilleur moyen de démocratiser l’État.

Certain·e·s pourraient penser qu’il faut oublier tout ce qui s’est passé et attendre de voir si, un jour prochain, les deux tiers du Congrès espagnol décident de modifier la Constitution espagnole de 1978, notamment l’article stipulant que l’unité de l’État espagnol est indissoluble. Notre réponse est simple : nous ne luttons pas pour établir un nouveau cadre territorial. Nous voulons contribuer à un monde plus juste, nous voulons mettre la vie au centre et nous désirons établir des normes juridiques et politiques qui répondent aux besoins de la majorité de la population et non des élites. Rien de tout cela n’est possible dans le cadre de l’État espagnol, malheureusement, car la tendance à l’autoritarisme est encore trop présente.

Ainsi, je ne sais pas si la République catalane sera féministe, mais je sais qu’il sera possible, au moins, d’avoir un processus permettant de définir des bases constitutionnelles dans une perspective de genre. C’est déjà beaucoup plus que ce que nous avons et c’est quelque chose que nous ne pouvons ni ne devons abandonner.

Propos recueillis par Juan Tortosa

Traduction : Delphine Rumpczyk

Le 27 novembre pour les élections au CROUS les étudiantes et étudiants des départements d’Ille-et-Vilaine et Cotes d’Armor pourront voter pour une liste bretonne qui défend le droit de décider, le féminisme, la langue bretonne , l’amélioration du logement étudiant, le versement des bourses à date fixe, la gratuité des frais d’inscription….

Elle est intitulée Union des EtudiantEs BretonNEs / Unvaniezh Studierien-Studierezed Breizh.

Le discours est simple, décomplexé et articulé sur la territorialité, le refus des logiques libérales, la défense du service public, la diversité linguistique, le refus de la xénophobie et la LGBTphobie….Leur profession de foi est bilingue.

Il convient de souligner leur clin d’oeil appuyé au collectif Bak e Brezhoneg qui lutte pour l’extension de l’utilisation de la langue bretonne dans les examens du baccalauréat puisqu’ils et elles et ils affirment le droit ” à faire ses études en langue bretonne de la maternelle à l’université et de passer ses examens en breton “…Voter et faire voter pour eux sera une façon symbolique mais claire de lutter contre les récents propos de Blanquer ministre de l’éducation qui refuse avec mépris toujours aux jeunes bretons ce que les Basques du nord : le droit de passer l’épreuve de math au bac dans leur langue d’éducation.

C’est une occupation partielle de l’espace électoral couvert par le CROUS ( Centre Régionale de Oeuvres Universitaires et Scolaires ) puisque il n’y pas de liste pour les départements Morbihanais et Finistérien mais une initiative à souligner et faire connaitre au sein de la jeunesse scolarisée car depuis 2012 aucune liste de ce type n’était présente en Bretagne au scrutin du CROUS. Le département de Loire-Atlantique est malheureusement rattaché au CROUS Pays de la Loire.

La liste des candidatEs de l’UEB issus de l’UFR Langues de REnnes 2 et de l’IEP est là.

Leur pages Facebook est là  et le compte twitter ici

Une université ouverte à toutes et tous

  • Suppression de la CVEC, gratuité des frais d’inscription sur l’ensemble de la Bretagne.

  • Meilleure accessibilité aux personnes en situation de handicap.

  • Pas de mention du sexe ou du genre sur les papiers étudiants.

  • Solidarité avec les personnes sans papiers, droit de chaque étudiant quelles que soient ses origines et sa nationalité à étudier en Bretagne dans de bonne condition (logements, aides sociales).

  • Pour un service public d’éducation breton post-bac accessible à toutes et tous sur l’ensemble du territoire breton (44 inclus).

Un Crous de Bretagne aux compétences élargie financé par la région

  • Moins de délai d’attente.

  • Bourse à jour fixe.

  • Revenu de base étudiant de 800 euros.

  • Construction de Cité universitaire et rénovation des anciennes.

  • Suppression de la règle selon laquelle les parents doivent subvenir aux besoins de leurs enfants.

  • Referendum lors des prochaines élections du CROUS en 2020 sur le Rattachement du CLOUS 44 au CROUS Bretagne et la dévolution des compétences du CNOUS au CROUS Bretagne.

Resto U

  • Baisse du prix des tickets de RU.

  • Favoriser des produits bio et bretons.

  • Respect des régimes alimentaires de chacun.e. 

  • Amélioration des conditions de travail des salariés et revalorisation des salaires.

Langue bretonne

  • Signature des chartes :

    • « du Galo, d’am Yan, d’am vèr »

    • « Ya d’ar Brezhoneg ».

  • Formation rémunérée en breton au personnel du CROUS.

  • Généralisation du bilinguisme sur l’ensemble des structures du CROUS (Resto U, Résidence universitaire …) et des documents produits par le CROUS.

  • Droit à faire ses études en langue bretonne de la maternelle à l’université et de passer ses examens en breton.

Informatique

  • Noms de domaine du CROUS Bretagne en « .bzh ».

  • Favoriser logiciels libres, a l’échelle des universités.

Suite de la chronique  Québecoise sur les élections provinciales du 04 octobre entamée ici. Merci à notre correspondant !

Raz de marée de la CAQ

                Coup de tonnerre sur la Belle Province. La CAQ (Coalition Avenir Québec) rafle 74 des 125 sièges du parlement du Québec, avec près de 37,5% des suffrages exprimés. Le parti, dirigé par l’homme d’affaire millionnaire François Legault, obtient donc la majorité absolue, ce qui lui permettra d’appliquer son programme politique sans entrave. En tant que socialiste, on ne peut que s’alarmer de cette situation. Le projet de Legault ne diffère pas celui de Trump aux Etats-Unis : exploitation débridée de l’écosystème, « rééquilibrage » du budget à coup de coupes dans les secteurs sociaux ainsi que rejet des immigrants, en particulier des musulmans, comme le montre une des premières mesures annoncée par la CAQ qui consiste à interdire les signes religieux pour les employés du gouvernement (les fonctionnaires étaient notamment autorisés à porter le voile). Que ceux qui doutent encore de l’orientation politique de la CAQ constatent par eux-mêmes que la personnalité politique française qui s’est réjouie de ce que « contrairement à ce que serinaient les libéraux immigrationnistes béats, les Québécois ont votés pour moins d’immigration » n’est autre que Marine Le Pen. Il est certain que des propositions identitaires comme le test de valeurs québécoises pour les immigrés n’a plus que plaire à la dirigeante du Rassemblement National.

François Legault en compagnie du Premier Ministre canadien Justin Trudeau

Fin du règne libéral et désintégration du Parti Québécois

                Cependant, annoncer que le Québec serait devenu un pays de droite serait présomptueux. A l’image des élections américaines et françaises, ces élections ne sont rien d’autre que l’expression d’une grogne populaire, un vote « sanction » d’une population lassée d’une offre politique restreinte et périmée. Le PLQ (Parti Libéral du Québec), qui régnaient jusqu’à présent sans conteste au Canada, vient de subir sa seconde défaire cinglante en peu de mois. Le nombre de siège du parti au Québec passe de 68 à 32, avec moins de 25% des suffrages exprimés. La perte de l’Ontario au conservateur Doug Ford, suivi par cette nouvelle défaite au Québec face à Legault font que le parti libéral vient de perdre son emprise sur les deux plus densément peuplées et économiquement développées provinces du Canada. La sanction a été à la hauteur des déceptions de la population. Néanmoins, le plus grand perdant de ces élections est le PQ (Parti Québécois). Originellement un des plus puissants partis au Québec, le PQ a subi une gifle monumentale, passant de 30 élus en 2014 à 9 et perd même son statut officiel de parti au parlement ! Le dirigeant du parti, Jean-François Lisée, a même été défait dans le quartier de Rosemont à Montréal par un candidat du parti indépendantiste de gauche, Québec Solidaire, et a annoncé sa démission de la direction du parti. Ceci est le résultat d’une campagne catastrophique, durant laquelle Lisée a accumulé les sorties décrédibilisantes à propos de ses opposants de gauche, Québec Solidaire, les qualifiant de « marxistes », « dogmatiques », contre le « bien commun » (c’est-à-dire contre une alliance avec le PQ) et « d’accepter la partition du Québec » (possibilité pour les peuples autochtones de se séparer du Québec lors de l’indépendance de ce dernier). Il est amusant de remarquer qu’au lendemain des élections, ce même PQ s’annonçait « prêt à collaborer avec QS ».  En vérité, l’échec du PQ ne repose que sur le parti lui-même, qui s’est détaché depuis longtemps des préoccupations sociales de la population québécoise, laissant le champ libre à Québec Solidaire, et est resté ancré dans un nationaliste unitaire et replié sur lui-même, terrain largement dominé par la CAQ.

Percée timide de Québec Solidaire

                Le parti QS (Québec Solidaire) a atteint ses objectifs et a triplé son nombre d’élus, passant de 3 à 10 avec 16,10% des suffrages exprimés, devançant le défunt PQ, et compte bien se définir comme la principale force d’opposition à la CAQ. La campagne de QS fut claire et malgré un résultat modeste, en avançant des mesures sociales concrètes comme le transport en commun à moitié prix, l’assurance dentaire pour tous, la rédaction par une assemblée d’une constitution pour le Québec, la gratuité scolaire, l’augmentation du salaire minimum à 15 dollars, QS a réussi à pousser la campagne vers la gauche, forçant le PLQ et le PQ à se positionner en faveur de mesures similaires aux leurs. Il est bon de noter que lors de la montée de QS dans les sondages, certains journaux se sont empressés de tenter de décrédibiliser QS de manière éhontée, le Journal de Montréal en publiant une opinion de Denise Bombardier, une bourgeoise du milieu médiatique « spécialiste de la pensée communiste », traitant QS de parti « parti d’extrême gauche qui rejette notre système « capitaliste » et qui exècre la social-démocratie à la québécoise », d’insinuer que « Marx, Lénine et même Trotsky sont les inspirations de la pensée [de Québec] solidaire » et de conclure que « Québec solidaire est une réelle menace pour l’avenir de la démocratie », rien que cela ! Le blogue de Michel Hebert dans le Journal de Québec n’était guère plus flatteur, qualifiant « leur positionnement sur l’environnement » de « lubie irréaliste », leurs dirigeants « de deux co-mythomanes », leur reprochant l’absurdité économique de « cinq semaines de vacances pour tous et le salaire minimum à 15 dollars » dans un pays où seules deux semaines sont prévues dans la loi et rappelant que les québécois sont les « champions nord-américains des programmes sociaux », ce qui fera doucement sourire un lecteur breton ou français… Il est intéressant de constater que peu importe le pays et le degré d’aides sociales, les classes dirigeantes reprocheront toujours aux travailleurs leurs conquis sociaux, que cela concerne les vacances trop longues ou la fainéantise des employés ! Les classes dirigeantes ne seront satisfaites que lorsque tout le système de sécurité sociale aura été démantelé, que ce soient deux ou cinq semaines de congés payés ou un salaire minimal de 15 dollars ou 10 euros !

La suite

                L’avenir apparaît sombre. Le programme politique de la CAQ n’augure rien de bon, nous ne pouvons qu’espérer que sa popularité chute brutalement dès l’application de leurs premières mesures. En ce qui concerne l’indépendantisme, les résultats sont mitigés. Pour la première fois depuis des années, la thématique de l’indépendantisme est dominée par un parti de gauche et la domination du PQ est à sa fin, ce qui pourrait amener à la renaissance d’un mouvement nationalitaire plus sain. Cependant, il faut se rendre à l’évidence, serait-ce la fin d’un cycle indépendantiste au Québec lorsque les deux partis prônant l’indépendance totalisent à peine 19 sièges sur 135 au parlement ?

“La Colonne Bonaventure”

Sources :

https://www.ledevoir.com/politique/quebec/538259/signes-religieux-les-employes-de-l-etat-recalcitrants-pourraient-perdre-leur-emploi-avertit-la-caq?utm_campaign=Autopost&utm_medium=Social&utm_source=Facebook#Echobox=1538587998

http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-quebecoise/201810/02/01-5198821-immigration-marine-le-pen-endosse-les-mesures-de-francois-legault.php?utm_source=dlvr.it&utm_medium=twitter

https://www.lesoleil.com/actualite/politique/la-caq-imposerait-un-test-des-valeurs-aux-immigrants-pour-bloquer-le-burkini-57423625592a5dd6baaa28e63361208b

http://www.lapresse.ca/actualites/elections-quebec-2018/201810/01/01-5198686-defait-jean-francois-lisee-quitte-la-direction-du-pq.

Les élections provinciales auront lieu en octobre au Quebec, un étudiant breton qui vit là-bas se définissant comme communiste libertaire et signant “La Colonne Bonaventure” nous a proposé cet article qui souhaitait informer le public breton et français des réalités du terrain sur l’indépendantisme et le socialisme, assez méconnus en fin de compte, et sur les élections québecoises et canadiennes. Nous le remercions vivement. Son analyse n’engage que lui mais intéressera sans doute beaucoup de lecteurs et lectrices pour qui l’indépendantisme Québecois est un référent historique.Bretagne-Info.

Québec : indépendance, socialisme et Trumpisme en ce début de 21ème siècle

Le Québec est l’une des principales références contemporaines francophones des luttes pour l’indépendance. Mais depuis les victoires obtenues par le peuple québécois dans les années 60 et 70 face à l’hégémonie culturelle et économique anglo-canadienne et le très célèbre « vive le Québec libre ! » de De Gaulle en 1967, qu’en-est-il désormais du mouvement indépendantiste québécois et de ses revendications ?

Commençons pour des rappels historiques. Le Québec, comme de nombreux pays du monde en cette période de décolonisation, n’échappa pas à l’explosion des mouvements de libération nationaux des années 60/70. Contrairement à des nombreux cas, ce mouvement, connu sous le nom de « Révolution Tranquille », fut essentiellement pacifique (avec l’exception notable du FLQ) bien que radical dans ses revendications. Dès les années 50, des leaders syndicaux, tel que Michel Chartrand, pousse la classe ouvrière, non seulement québécoise mais aussi canadienne, à se doter d’un organe politique afin de canaliser l’effervescence présente dans les masses. Ce fut chose faite en 1961 lors de la création du Nouveau Parti Démocratique (NPD), parti qui existe toujours de nos jours. Cependant, très rapidement l’anglo-chauvinisme des leaders anglo-canadiens de gauche poussera le parti à l’éclatement entre socialistes franco-canadiens d’un côté et les anglo-canadiens de l’autre, ces derniers conservant le contrôle du NPD. Les travailleurs québécois, isolés culturellement sur le continent nord-américain, n’aurons d’autres choix que de s’allier avec les classes moyennes et capitalistes francophones locales afin de défendre leurs intérêts économiques et culturels. Tout ceci se concrétisera dans la naissance du célèbre Parti Québécois (PQ) en 1968. Dans cette ambiance explosive, ponctuée par la trop souvent oubliée grève générale du Québec de 1972, et sous la direction de René Lévesque, le PQ gagnera les élections provinciales de 1976. Durant cette « Révolution Tranquille », plusieurs mesures révolutionnaires seront prises, comme la fameuse loi 101 ou Charte de la Langue Française en 1977, imposant le français comme seule et unique langue officielle de la province (contrebalancé par un bilinguisme officieux), la nationalisation de l’électricité sous le contrôle de Hydro-Québec amorcée dès 1944 et complétée en 1962, et finalement deux référendums sur l’indépendance, l’un en 1980 (59% pour le fédéralisme) et un autre en 1995 (50,58% contre l’indépendance).

Bien qu’il ait pu sembler exister une unité nationale autour du PQ, la lutte des classes reprit le dessus et, comme de nombreux mouvements indépendantistes bien engagés avant lui, le PQ prit un virage à droite. Il faut bien rappeler le caractère « incestueux » du PQ, dans lequel cohabitait des syndicalistes révolutionnaires et des conservateurs. René Lévesque, le dirigeant du PQ, aurait lui-même déclaré qu’il « aimerait mieux vivre dans une république bananière d’Amérique du Sud que dans un Québec dominé par les délires des syndicats ». Le PQ avait donc essentiellement été poussé par une base militante populaire extrêmement combattive plus que par ses cadres, provenant souvent de l’aristocratie francophone du Québec. De tels contradictions ne tardèrent pas à se concrétiser et en 1983, le PQ adopta la répugnante loi 111, ou « loi matraque », qui permettait en cas de prolongement d’une grève d’imposer des pertes de salaires et d’ancienneté aux employés, ou simplement de congédier les plus récalcitrants sans droit de recours ou d’appel. La loi 105, adoptée un peu plus tôt, suspendait de plus le droit de grève pour les fonctionnaires. Pour la première fois depuis la fondation du parti, une manifestation fut dirigée contre René Lévesque et le PQ. Le parti avait prouvé qu’il était capable de faire le travail historiquement réservé aux partis anglo-canadiens et aux libéraux : soumettre les travailleurs québécois aux intérêts capitalistes. Cependant, en l’absence de parti réellement socialiste au Québec et de l’existence de racines originelles communes entre le PQ et le syndicalisme québécois, les principaux syndicats ont continué jusqu’à nos jours à démontrer une infatigable, mais mal récompensée, loyauté envers le PQ.

Qu’en est-il aujourd’hui ? A la veille d’élections provinciales, le Québec se retrouve dans une situation similaire à celle de nombreux pays occidentaux : le bipartisme s’écroule. Alors que couramment le PQ et les libéraux combinaient à eux seuls près de 80% des suffrages, les derniers sondages indiquent qu’ils en obtiendraient moins de 50. Les causes sont multiples. Tout d’abord, le Parti Libéral du Québec, après des années au pouvoir et les échecs répétées de ses politiques, que ce soit pour contenir la crise de 2008 ou tout simplement défendre les intérêts des travailleurs, ne peuvent s’en prendre qu’à lui-même. Du côté indépendantiste, ayant perdu la confiance des masses, le PQ s’est engagé sur la pente glissante de l’identité nationale, avec des mesures anti-musulmans et anti-réfugiés, bien éloignées d’un indépendantisme socialiste, pour tenter de trouver un second souffle. Cependant là n’est pas le pire pour le mouvement québécois.

Francois Legault

Un ancien péquiste, François Legault, a fondé en 2011 la Coalition Avenir Québec (CAQ). François Legault est un riche homme d’affaire québécois, fondateur de la compagnie aérienne AirTransat, qui surfe sur la vague nord-américaine du « businessman politicien ». A l’instar de Trump, Legault allie promesses démagogiques aux travailleurs et appui décomplexé envers le patronat, tout en répétant la rengaine désormais classique sur la bureaucratie vampirique. Son programme est simple : privatisation de l’éducation et des garderies, « modernisation des syndicats », quotas d’immigration couplé d’un « examen de connaissance de valeurs québécoises », réductions de délais pour démarrer un projet minier, attirer les capitaux étrangers et « libérer la force de nos entrepreneurs », « encourager la participation au marché du travail le plus longtemps possible » des travailleurs âgés, abolir des emplois dans les entreprises d’Etat tels que Hydro-Québec, le tout accompagné de son florilège de remarques Trumpesques : les femmes seraient moins regardantes que les hommes sur les salaires, les jeunes québécois devraient s’inspirer de l’esprit travailleur asiatique, sans oublier que « les syndicats ont le droit de grève, mais c’est un droit de grève qui est, disons, théorique parce que ça finit à répétition avec des projets de loi spéciaux » ! Malgré cela, la CAQ est en tête des sondages avec près de 32% des intentions de vote et risque bien de remporter les élections provinciales, ce qui serait un coup terrible pour le Québec et le socialisme. Pour ce qui est de l’indépendantisme, la CAQ l’a simplement abandonné et se limite à revendiquer « plus d’autonomie pour le Québec à l’intérieur du Canada ». Cependant, peut-on réellement blâmer le Québec alors qu’il se retrouve isolé avec Trump au Sud, dont la réputation n’est plus à faire, et Doug Ford, l’ex-conseiller municipal de Toronto récemment élu premier ministre de l’Ontario, à l’ouest, dont les premières mesures ont été d’annuler des centaines de projets d’énergies renouvelables ainsi qu’un projet pilote de revenu universel, tenter d’empêcher les professeurs d’éducation sexuelle d’enseigner la théorie du genre, menacer des couper les subventions aux universités ne soutenant pas le « free speech » de présentateurs « controversés » et s’opposer à l’interdiction des armes de poings à Toronto tout en augmentant les fonds alloués à la répression policière.

Un seul petit espoir subsiste, c’est Québec Solidaire (QS). Ce parti, fondé en 2006 et né d’une scission de la frange gauche du PQ, bien que loin d’être révolutionnaire ou de s’assumer pleinement socialiste, est ce qui apparaît le plus à gauche dans le courant indépendantiste québécois. Plusieurs mesures phares de leur programme le démontrent clairement : assurance dentaire universelle, transports publics à moitié prix, rédaction démocratique d’une Constitution qui servirait de base à un Québec indépendant, gratuité scolaire complète jusqu’au doctorat, rémunérations des stages, augmentation du salaire minimum à 15 dollars. Malheureusement, malgré un dynamisme certain et une campagne agressive, le parti n’obtient péniblement que 16% des intentions de vote.

Quel sera donc l’avenir pour le Québec, son indépendance et son socialisme ? Qu’adviendra-t-il du moribond Parti Québécois ? La CAQ va-t-elle triompher et retarder de plusieurs années les avancées sociales du pays, si ce n’est pire ? Ou assisterons-nous à une agréable surprise avec Québec Solidaire qui pourrait paver la voie à un renouveau du socialisme indépendantiste québécois ? Nous ne pouvons qu’espérer que dans le cas d’une victoire de la CAQ, les socialistes indépendantistes québécois sauront prodiguer le soutien constant qui sera nécessaire afin de traverser cette période troublée.

La Colonne Bonaventure

Sources :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Michel_Chartrand

https://fr.wikipedia.org/wiki/Parti_québécois

https://www.marxiste.qc.ca/analyses/780-le-marxisme-et-la-question-nationale-au-quebec.html

https://marxiste.qc.ca/nouvelles/quebec/795-comment-stopper-la-caq.html

https://coalitionavenirquebec.org/fr/

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1036514/construction-opposition-partagee-projet-loi-speciale

https://www.theglobeandmail.com/canada/article-doug-ford-year-one-ontario-premier-explainer/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Québec_solidaire

https://quebecsolidaire.net

https://www.latribune.ca/actualites/elections-2018/sondage-mainstreet-gcm-dans-richmond-bachand-loin-devant-341f9851b213ebe7733d0e3579c8acd7

Cela fait un an.

Cela fait un an depuis qu’un jeune breton de 18 ans, Erwan, a été laissé pour mort le soir du 7 mai 2017 à Nantes.

Cela fait douze mois depuis qu’Erwan a été violemment agressé à coups de poings, étranglé par des mains gantées, gazé directement dans les yeux, frappé à la tête à l’aide d’une matraque télescopique et de bouteilles en verre.

Cela fait 365 jours depuis qu’Erwan a été lâchement abandonné par ses cinq agresseurs, baignant au sol dans son propre sang et inconscient près de la station de tram Du Chaffault.

Cela fait plus de 8700 heures depuis qu’Erwan a eu ses cervicales fracturées, que son nez a été cassé, qu’il a fait un arrêt cardiaque.

Depuis, Erwan a été plongé dans le coma pendant plusieurs jours. Du sang en quantité importante dans le cerveau. Pronostique vital engagé. Trois mois de corset et de minerve à sa sortie de coma. Des troubles cognitifs persistants. La peur de sortir le soir. Une infirmité permanente. Des séquelles neurologiques à vie.

Les agresseurs d’Erwan appartiennent à la mouvance d’extrême-droite ultraviolente, en l’occurrence le groupuscule « GUD Bretagne » qui s’est depuis auto-dissous. Quatre présumés agresseurs sont arrêtés en juin 2017. La presse révèle alors leurs noms — Joyce Burkart, Tanguy Martin, François Mamès Cosseron de Villenoisy et Antoine Desbas — et leurs profils confirment ainsi l’aspect politique de la tentative d’homicide en réunion. Le cinquième membre de la bande, Matthieu Gaultier de La Richerie, est lui arrêté en septembre 2017, soit 5 mois après les faits…

Des faits de délinquance ultraviolente jamais évoqués sur le blog Breizh Info pourtant très porté sur les chroniques sécuritaires… sans doute un peu beaucoup gêné que des proches aux patronymes bien « bleus blancs rouges » se retrouvent dans la page « justice » des titres de la PQR…

Pourquoi reparler de cette affaire maintenant ?

Il y a quelques semaines, la tombe de l’Abbé Perrot à Scrignac était dégradée et quelques messages antifascistes étaient peints en breton et en français aux abords.

Indignation immédiate d’une partie de l’Emsav (le mouvement breton), notamment dans les milieux catholiques.

Cette campagne d’indignation est bien vite relayée par tous les réseaux que compte l’extrême droite, à savoir le blog Breizh Info de Yann Vallerie et Breiz Atao du multi-récidiviste raciste et antisémite Boris Le Lay, ainsi que leurs relais sur les sites « patriotes français ».

La tentative de récupération — maladroite — ne fonctionnera pas : des catholiques modérés comprendront la manœuvre que tente d’opérer l’extrême droite et se refuseront à cautionner les appels à la vengeance.

Mais la Gauche Indépendantiste Bretonne se retrouve tout de même très vite accusée : on nous reproche de ne pas nous désolidariser d’un acte que nous n’avons ni revendiqué ni commis, et que nous n’approuvons pas ! Gael Roblin précise même au journal Le Poher : « je ne comprends pas qu’on s’en prenne à une tombe. En tant que militant politique, je désapprouve cet acte qui victimise l’extrême droite et qui donne de l’importance à ces groupuscules ». Breiz Atao et Breizh Info et à travers eux toute la mouvance de droite ultra a donc essayé d’exploiter sans succès ce fait divers. Nous reviendrons dans les semaines qui viennent sur le naufrage qu’a été la mobilisation de Scrignac pour la droite ultra qui a réessayé au passage de nous faire croire (en français…) que cet Abbé avait été exécuté en raison de son engagement pour la langue bretonne… Affirmation ridicule…

L’indignation sélective d’un certain mouvement breton

Alors qu’une partie du mouvement breton nous tombe dessus pour nous demander de nous excuser pour un acte que nous n’avons pas commis, nous constatons que l’agression du jeune Erwan est passée complètement inaperçue dans ce même milieu… Malgré de très nombreux articles de la grande presse nantaise. À moins que certains ne veuillent pas voir……

Dans ce qu’on appelle le mouvement breton nous avons pratiquement été les seul·e·s, à la Gauche Indépendantiste, à nous préoccuper publiquement de l’état de santé d’Erwan, à dire que l’extrême droite en Bretagne est un danger permanent et persistant, et à informer régulièrement sur les faits indiquant une certaine porosité assez nouvelle du milieu culturel, politique et médiatique breton avec l’extrême droite.

Contre-attaque

À ceux et celles de ce mouvement breton qui passent leur temps à attaquer la Gauche Indépendantiste pour des motifs futiles, qui nous demandent de nous excuser en permanence, qui nous accusent sans fondements et surtout sans aucune cohérence politique, nous leur demandons de réfléchir simplement aux quelques questions que nous leur soumettons ci-dessous :

  • Comment se fait-il que cet « Emsav » se soucie plus de dégradations sur la tombe d’un Abbé antisémite et proche des milieux collabos assassiné (en temps de guerre) il y a plus de 70 ans plutôt qu’à l’état de santé d’un jeune nantais ?

Erwan est pourtant un jeune breton qui n’aspirait qu’à vivre sa vie normalement… avant qu’il ne croise la route d’une bande de ces 5 sympathisants fascistes. Vu le peu de réaction dans l’Emsav, c’est à croire que l’agression gratuite et ultraviolente d’Erwan n’intéresse pas une partie du mouvement breton. Erwan vit dans un quartier modeste de Nantes avec sa mère qui l’élève seule avec 800 €… Ce mouvement breton n’inclurait donc pas le jeune Erwan dans son projet de société ? Ce mouvement breton préfère nous faire pleurer pour des dégradations stupides sur la tombe d’un vieil Abbé antisémite mort il y a 70 ans plutôt que de parler d’une jeune nantais handicapé à vie suite à une agression fasciste commis par des gens que certains d’entre eux connaissent très bien ?

Pourquoi ces brutes l’ont ils ainsi agressé ? Ils l’ont prit pour un “antifa”, comme son ami lui aussi agressé heureusement moins gravement...c’est ce qu’ils ont admis en garde à vue, garde à vue pendant laquelle certains ont été prolixes sur leur comparses.

Une étudiante en droit militante de l’extrême-droite locale a tenté d’intimider Erwan sur son lit d’hôpital pour lui faire changer sa version. Elle a été jugée et condamnée pour subornation de témoin.

  • Comment se fait-il que cet « Emsav » ne parle pas des liens du blog de Yann Vallerie — Breizh Info — avec Joyce Burkart, l’un des agresseurs présumé d’Erwan ?

Joyce Burkart était pourtant co-listier de Christophe Daniou aux élections législatives de 2012 sur la 1ère circonscription d’Ille-et-Vilaine pour la liste « Jeune Bretagne », dont le porte-parole était… Yann Vallerie ! Christophe Daniou qui aura également été colistier FN à Rennes, membre du Bloc Identitaire et connu pour sa proximité avec les fascistes ultras de Casapound comme le rappelait le collectif antifa rennais dans son dossier.

Beaucoup de personnes continuent encore aujourd’hui à relayer les articles du blog d’extrême-droite Breizh Info malgré nos nombreuses mises en garde. Ou, pire, continuent à donner des interviews à ce média, en nous disant qu’il en vaut bien d’autres… On peut ainsi nommer Yannig Bigouin d’EELV, Gael Fleurent du Parti Breton… Quelle honte…

Mais la bande de Joyce Burkart ce n’est pas seulement celle de jeunes fils de bonnes familles proches du FN qui agressent Erwan, et bien d’autres avant. Car cette bande est mêlée à de nombreux actes racistes à Angers et Nantes. C’est aussi eux qui ont semé le trouble dans une manifestation de triste mémoire de Bretagne Réunie en septembre 2016. Un nombre certains de militants siglés « Yaouankiz Breizh » (sigle cache-sexe de toute la mouvance suprémaciste blanche en Bretagne, d’Adsav au Bloc Identitaire et réutilisé en avril dernier à Scrignac) s’était incrustée dans la manifestation de Bretagne Réunie pour le retour de Nantes en Bretagne et ce avec la bénédiction d’une partie des dirigeants de cette association.

L’infiltration du groupuscule d’extrême-droite “Yaouankiz Breizh” en septembre 2016…

 Un an après cette manifestation honteuse nous rappelions :

Pour autant, cela ne semble pas perturber Bretagne Réunie, l’association organisatrice de la manifestation, qui réaffirme que « la réunification de la Bretagne n’est ni de droite, ni de gauche » et qu’elle « accueillera à Nantes tous les supporters de la Bretagne à 5 », refusant ainsi de condamner l’extrême-droite et la jugeant même bienvenue dans son cortège.

Depuis, nous avons réoccupé la rue pour l’unité territoriale de la Bretagne en 2017 et initié un nouveau cycle de mobilisation pour l’autodétermination, et ce de manière clairement antifasciste.

Les médias de la “réinfosphère” de la droite extrême en Bretagne ou complaisant à leur égard sont de nouveaux exclus des mobilisations suite à notre travail d’information et de veille antifasciste.

Une dernière question, cette mise au point ayant été faite, ces boursouflures d’un certain « mouvement breton ni de droite ni de gauche » vont ils continuer à affirmer que les « extrêmes se rejoignent » ?

Nous connaissons la réponse, c’est oui, ils vont continuer, car ils sont responsables de la banalisation des propos de droite extrême, raciste et xénophobe comme le prouvent ce récit.

En septembre 2016 nous écrivions :

Nous souhaitons que cet épisode honteux permette d’entamer un débat de fond pour remobiliser de larges secteurs du peuple breton en faveur de la réunification et du droit à l’autodétermination, et marginalise définitivement les responsables de l’impasse politique dans laquelle nous nous trouvons, qui resteront marqués à tout jamais de leur complaisance ignoble envers des racistes et des fascistes.

Nous n’oublions rien.

L’extrême-droite menace, frappe et tue comme le savent les familles d’Erwan, de Clément Méric et d’autres bretons tués ou handicapés à vie suite aux exactions fascistes.

Il n’y aura pas de négociation ni de complaisance avec ceux qui leur trouvent des excuses…

À bon entendeur…

Des militants antifascistes et indépendantistes bretons de gauche.

 

La Gauche indépendantiste dénonce vivement la dérive dictatoriale du gouvernement espagnol en Catalogne. Après l’incarcération de cinq nouveaux dirigeants indépendantistes catalans vendredi, Jordi Turull, candidat à la présidence de la Generalitat, Carme Forcadell, ancienne présidente du Parlement catalan, Raul Romeva, Josep Rull, et Dolors Bassa, anciens ministres, c’est l’ancien président de la Generalitat, Carles Puigdemont, qui a été arrêté hier. Alors qu’il rentrait de Finlande en Belgique, où il est en exil depuis octobre 2017, Carles Puigdemont a été arrêté en Allemagne à la frontière avec le Danemark. Cette arrestation rendue possible par la réactivation d’un mandat d’arrêt par l’Etat espagnol depuis vendredi l’a été également par la collaboration de la police allemande avec les services secrets espagnols. Carles Puigdemont a depuis été incarcéré dans une prison allemande en attente de présentation à un juge qui se prononcera sur son extradition.

C’est à une véritable criminalisation de la mouvance indépendantiste catalane à laquelle se livre Rajoy et ses sbires. Si le régime espagnol incarcère, il pousse aussi à l’exil politique. Après notre camarade Anna Gabriel exilée en Suisse, c’est vendredi au tour de Martina Rovira, n°2 d’ERC, de fuir les geôles madrilènes auxquelles elle s’estimait promise.

C’est dans le silence assourdissant des autorités européennes que vivent en exil des élus du peuple catalan, que sont embastillés dix prisonniers politiques. Tous poursuivis pour avoir appliqué le mandat que le peuple catalan leur a majoritairement confié par la voie des urnes. A cela, l’État espagnol répond par la répression judiciaire et policière puisque près de 100 manifestants ont été blessées hier soir à Barcelone, étant parfois même pourchassées jusque dans les bars.

Élevons-nous ici en Bretagne contre la dérive fasciste de l’État espagnol et la complaisance de l’État français toujours prompt à soutenir l’unité espagnole. Ainsi, le ministre des affaires étrangères Le Drian, affirmait le 27 octobre 2017 “La France souhaite que l’Espagne soit forte et unie. Elle n’y a qu’un seul interlocuteur qui est le gouvernement de Madrid. La constitution de l’Espagne doit être respectée. C’est donc dans ce cadre, qui est celui de l’État de droit, que la question de la Catalogne doit être envisagée. C’est la raison pour laquelle la France ne reconnaît pas la déclaration d’indépendance que le parlement catalan vient d’adopter.”

Nous dénonçons le silence complice des autorités européennes. Ces mêmes autorités qui par leur silence pourfendent la volonté des peuples opprimés de construire leur avenir. Au Kurdistan, où elles ont fermé les yeux sur les exactions du président turc Erdogan à Afrin, comme en Catalogne où elles sont abonnés absents pour condamner Rajoy et sa clique franquiste.

Nous appelons à soutenir toutes les initiatives qui pourraient être organisées en soutien avec la Catalogne ici en Bretagne où se trouvent le consulat d’Espagne à Rennes et les consulats d’Allemagne à Nantes, Brest et Rennes.

Liberté pour les prisonniers politiques !

Vive la Catalogne indépendante et socialiste !

 

Connue en Bretagne pour avoir animé le Forum citoyen de Bretagne à Nantes en 2013, la porte-parole de la CUP (Candidature d’Unité populaire, gauche indépendantiste) Anna Gabriel Sabate est poursuivie pour sa participation à l’organisation du référendum d’autodétermination du 1er octobre 2017 avec plus de 900 personnes (élu.e.s, citoyen.ne.s, membres de la société civil, fonctionnaires…).
Yann Chouq et Anna Gabriel Sabate à Nantes lors du Forum Citoyen de Bretagne le 15 juin 2013.
Plusieurs dizaines de personnes sont déjà emprisonnées ou en exil, à l’instar du président Puidgemont réfugié à Bruxelles depuis la fin du mois d’octobre. Alors que son procès débute mercredi, elle s’est réfugiée à Genève pour internationaliser la question catalane auprès de l’ONU qui siège dans la ville suisse.
En cas de demande d’extradition de la part de l’état espagnol ou elle risque 30 ans de prison, Anna Gabriel demandera l’asile politique pour pouvoir continuer d’exercer son travail de professeure de droit à l’université.

Nous apportons à Anna Gabriel et à tout.e.s les prisonnier.e.s, exilé.e.s et poursuivis par le gouvernement espagnol notre entière solidarité. Nous exigeons l’arrêt de la répression contre le mouvement populaire démocratique catalan et la reconnaissance de la république catalane.

Le 30 septembre prochain défilera à Nantes la traditionnelle manifestation pour la réunification de la Bretagne. L’an dernier, celle-ci avait été l’occasion pour une centaine de militants d’extrême-droite de défiler impunément dans les rues de Nantes en scandant des slogans racistes.

Depuis, ces mêmes militants néo-nazis ont tabassés un jeune homme de 18 ans le soir du second tour des présidentielles, le laissant pour mort, et ont été inculpés pour diverses agressions racistes à Angers et à Nantes.

Pour autant, cela ne semble pas perturber Bretagne Réunie, l’association organisatrice de la manifestation, qui réaffirme que « la réunification de la Bretagne n’est ni de droite, ni de gauche »  et qu’elle « accueillera à Nantes tous les supporters de la Bretagne à 5 », refusant ainsi de condamner l’extrême-droite et la jugeant même bienvenue dans son cortège.

Yaouankiz Breizh, la même organisation qui menait le défilé de l’extrême-droite l’an passé, a d’ors et déjà appelé à contrer le cortège anticapitaliste le 30 septembre. Les récents événements de Charlottesville aux États-Unis, où une militante antifasciste a été assassinée par un néo-nazi, rappellent la dangerosité de laisser des fascistes défiler. La Bretagne est une terre de luttes et de résistances. Il donc impensable que la manifestation pour la réunification de la Bretagne soit encore une fois l’occasion pour les groupuscules les plus radicaux de l’extrême droite violente de venir parader dans les rues de Nantes.

Afin de rappeler à l’extrême-droite qu’elle n’est pas la bienvenue dans nos rues, nous appelons à former un cortège antifasciste, féministe et anticapitaliste le 30 septembre à 15h, place de la Petite Hollande.

Nantes, le 14 septembre,

Les différents groupes organisateurs du cortège anticapitaliste.

Quelques sources sur les innombrables agressions commises

par l’extrême droite à Nantes :

Octobre 2014 : 2 matons qui partaient de la manifestation bretonne font des saluts nazis dans le tramway à Nantes.

http://www.presseocean.fr/actualite/nantes-prison-avec-sursis-apres-les-saluts-nazis-15-10-2014-132157

Novembre 2015 : « Nantes. Deux cocktails Molotov jetés dans le squat des migrants »

http://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/incendie-criminel-deux-cocktails-molotov-dans-le-squat-des-migrants-3825345

Juin 2017 : 4 militants du GUD arrêtés pour un tentative d’homicide contre des adolescents à Nantes :

http://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/agression-du-chaffault-les-quatre-suspects-ont-ete-ecroues-5084218

Août 2017 : « Extrême droite. Entre Nantes et Angers, un long feuilleton de violences racistes »

http://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/angers-49000/entre-nantes-et-angers-un-long-feuilleton-de-violences-racistes-5214967

Septembre 2017 : « Nantes L’étudiant d’extrême droite soupçonné d’avoir commis d’autres violences »

https://www.presseocean.fr/actualite/nantesletudiant-dextreme-droite-soupconne-davoir-commis-dautres-violences-08-09-2017-244626

Alors que les Pays Catalans s’activent pour organiser un référendum d’autodétermination le 1er octobre prochain, Madrid et le pouvoir central espagnol ne cessent de mettre la pression et cherchent à bloquer ces initiatives démocratiques en usant de lois répressives, en menaçant de lourdes amendes les organisateurs, et dernièrement en convoquant le président du « Pacte Nacional pel Referèndum » dans une caserne de la Guàrdia Civil, renvoyant ainsi à une image d’état d’exception militaire, similaire à ce que l’on voyait sous la dictature franquiste…

Le processus démocratique en cours dans les Pays catalans mérite donc tout notre soutien et le partage de connaissances sur ce sujet. La lecture d’un entretien de BALLAST avec Anna Gabriel — élue de la formation indépendantiste et anticapitaliste CUP (Candidatura d’Unitat Popular) au Parlement de Catalogne — y contribue largement tant elle fait la synthèse entre lutte de libération nationale et luttes émancipatrices sociales : éducation, féminisme, santé, droits des travailleuses & travailleurs, et de manière plus locale avec des propositions d’alternatives au niveau municipal tendant à récupérer plus de souveraineté dans différents domaines.

Issue des milieux libertaires et antifascistes, Anna Gabriel est aujourd’hui députée au parlement catalan pour la formation indépendantiste de gauche CUP (Candidature d’unité populaire), qui joue un rôle-clé dans le processus d’indépendance de la Catalogne. Nous avons parlé de libération nationale, de municipalisme et de perspectives émancipatrices autour d’un café.

Aux élections autonomes catalanes de septembre 2015 — plébiscite sur la question de l’indépendance, convoquées par le président du gouvernement autonome catalan Artur Mas — « Junts pel Sí », alliance de plusieurs formations indépendantistes, n’a pas eu de majorité absolue, faisant de la CUP, avec 8 % des suffrages, le « faiseur de roi ». Vous avez bataillé pendant trois mois pour éviter qu’Artur Mas ne redevienne le président du gouvernement catalan — avec succès. Une façon de mettre la question sociale au centre des enjeux ?

Oui, mais pas seulement. Artur Mas était une personne qui faisait encore le lien avec un passé autonomiste d’un parti politique, CiU (Convergència i Unió), qui a toujours servi à la gouvernabilité de l’État — que ce soit en tolérant le Parti populaire (PP) ou le Parti socialiste (PSOE) au gouvernement. Je crois que dans la mémoire de beaucoup de gens, on se demandait si ce nouvel indépendantisme affiché d’Artur Mas était honnête, ou si c’était une façon de survivre politiquement. Et il y avait aussi la question de la corruption. Son parti a été condamné dans plusieurs scandales et il semble peu crédible que lui-même n’ait eu aucun lien avec cela. Lors des négociations avec Junts pel Sí, on a mis plusieurs alternatives sur la table, mais on se retrouvait face à une attitude de fermeture totale. Après trois mois de discussions très intenses, on a réussi à obtenir un autre candidat.

Face au refus de Junts pel Sí de se reporter sur un autre candidat, vous avez laissé votre base décider de la marche à suivre — avec un résultat surprenant : 1515 voix pour un gouvernement d’Artur Mas, 1515 voix contre.

On continue d’être une organisation « assembléaire » et ce type de décisions très importantes est pris par la base. Une grande pression médiatique reposait sur nous tout à coup ; on était au centre de l’attention. Nous n’avions pas d’autres options que de débattre et de demander aux membres de choisir. On est arrivé ainsi à une assemblée de plus de 3 000 personnes, très tendues et très fatiguées, pour obtenir à la fin ce résultat, que nous avons qualifié par la suite de « poésie politique ». Avec ce coup de force, deux jours avant la fin de la période de formation d’un gouvernement, Junts pel Sí a fait marche arrière et a proposé Carles Puigdemont en tant que président. Je pense que cela démontre qu’on peut aussi faire de la politique sans oublier que la souveraineté de notre organisation politique repose sur les militants. D’ailleurs, nous, les députés, n’avons pas voté ni donné de consigne de vote. Nous avons démontré que malgré la pression, on peut rester fidèle à soi-même. Je pense que sur le plan politique, c’est une expérience très intéressante.

On a l’impression que depuis cette élection, le processus enclenché depuis quelques années est un peu encombré…

Je crois que c’est surtout dû au fait que Junts pel Sí avait un programme politique qui était pensé pour gagner. Leur feuille de route était : remporter la victoire avec une majorité absolue, puis, pendant 18 mois, commencer à construire les structures d’un État, avant de déclarer l’indépendance de façon unilatérale. Comme si tout allait être aussi facile ! Comme si faire une déclaration d’indépendance à l’État espagnol — pas un État qui a des fondements démocratiques, non, on parle de l’État espagnol — allait être facile ! C’est sûr qu’il y avait, à ce moment-là, une vraie dynamique en faveur de l’indépendance, mais pour nous il semblait clair que la victoire allait être vraiment difficile à obtenir. Et plus encore avec un résultat comme celui des élections de 2015. C’est vrai qu’il y a eu, après ces élections, une majorité de députés indépendantistes, mais les partis indépendantistes n’avaient pas eu plus de 50 % des suffrages. En même temps, on savait qu’il n’allait pas y avoir la possibilité de négocier avec l’État espagnol ; la seule option pour nous était de remettre l’idée d’un référendum au centre de l’agenda politique.

Avec succès ?

Junts pel Sí a accepté notre initiative, et maintenant, nous militons pour que ce référendum se déroule au plus tard en septembre. Le problème, c’est que l’État espagnol refuse catégoriquement. Cela implique donc de le convoquer et de le tenir contre son gré sachant qu’il n’hésitera pas à engager des poursuites judiciaires contre les personnes impliquées. Il faut s’attendre à ces conséquences, et être prêts à payer ce prix. Nous, on le sait et on est prêts.

Quelles suites judiciaires la tenue d’un référendum pourrait-elle avoir pour les politiciens impliqués ?

On ne le sait pas réellement. Tous les conseillers du gouvernement, ainsi que la présidente et le bureau du Parlement catalan, ont reçu une injonction de la Cour constitutionnelle les menaçant de sanctions pénales. Ces sanctions pénales peuvent aller de l’interdiction d’exercer des fonctions d’élu à des amendes ou des peines de prison.

Quel rôle une formation anticapitaliste comme la CUP peut-elle jouer dans un processus qui implique autant la social-démocratie que la droite catalanes ?

Celui de la contradiction permanente. On ne dit pas que Junts pel Sí représente la droite, même s’il est vrai qu’une partie de la plateforme a un passé très lié aux intérêts de l’État et qu’ils ont souvent défendu des politiques qui sont très éloignées des nôtres. Mais dans le parlement catalan, il y a le Parti populaire, qui est la vraie droite — antidémocratique et raciste — ; un Parti socialiste dont on sait depuis longtemps que malgré son nom, il ne sert en rien les intérêts de la classe ouvrière ; et Ciutadans, très centraliste et très libéral. Et puis il y a les descendants de l’ancien Parti communiste, qui ne sont pas de droite, mais qui ne nous aident pas par rapport à la question du référendum. Voilà le panorama politique catalan. Plutôt que d’être liés à la droite catalane, nous sommes liés à la démocratie. On aimerait pouvoir faire ce type d’alliance avec des formations qui ne soient pas liées à la corruption, au libéralisme économique, mais malheureusement nous sommes obligés de faire des alliances là où c’est possible, tout simplement.

La CUP se revendique du « municipalisme »…

Oui, nous appelons cela « municipalisme de libération ». Il s’agit surtout d’aller au-delà d’une vue centrée sur les institutions. Notre objectif est d’être présents dans les quartiers, les villages, les villes, d’y travailler avec les expressions organisées de la société civile, et, peut-être, d’accéder aux institutions. Nous essayons de faire émerger des alternatives réelles au niveau local. Nous travaillons beaucoup en faveur de casals [sorte de centres sociaux autogérés, ndlr] dans les villes, nous travaillons aussi avec les organisations étudiantes, les organisations féministes, nous soutenons les coopératives… Pour nous, les municipalités ne sont pas la première étape pour accéder à la politique « sérieuse », non, elles représentent l’enjeu principal.

…pourtant, en 2012, vous avez décidé de participer, pour la première fois, à des élections au niveau catalan.

C’est en 2009 que nous avons eu le débat pour la première fois. Ceux qui étaient contre une participation à des élections au niveau catalan — dont je faisais partie — argumentaient que notre projet municipaliste n’était pas encore assez bien ancré. Nous avions, à ce moment-là, vingt-sept élus au niveau municipal et nous étions d’avis qu’ils nous fallait encore travailler beaucoup plus à ce niveau, consolider cette base, pour ne pas oublier cette idée de générer des alternatives réelles au niveau local, une fois franchi le pas vers le niveau national [catalan, ndlr]. En 2012, la situation politique en Catalogne était autre et il était nécessaire, pour nous, qu’y participe une force anticapitaliste, féministe, avec des tendances libertaires, issue des mouvements altermondialistes. Il nous fallait montrer que c’était aussi ça l’indépendantisme, et qu’on pouvait le séparer strictement des questions identitaires.

La question de la participation à des élections à un autre niveau que municipal était donc plus une question stratégique qu’une question de principe ?

Peut-être que pour certains c’est une question de principe, mais c’est avant tout un débat stratégique que nous avons eu, oui. On avait vu beaucoup de déception par rapport à ce qu’avait été le Parti communiste, pour donner un exemple. Il avait une force extraordinaire pendant le franquisme, une capacité d’organisation et de résistance tout en construisant des alternatives réelles aussi ! Et tout à coup, quand la démocratie est arrivée, il a investi les institutions et beaucoup de choses ont changé. Ça nous fait très peur, cette idée de pouvoir devenir une caricature de ce que nous défendons. Comment prévenir ça ? Il n’y a pas de solution magique, mais je pense qu’en ayant une base locale très consolidée, qui comprend que l’objectif principal est de construire des alternatives depuis le bas, nous sommes mieux préparés à éviter ce genre de dérives.

Quelle stratégie politique la CUP poursuit-elle au niveau municipal ?

En ce moment par exemple, nous sommes en train de développer et de mener une stratégie dite « de récupération des souverainetés ». On applique cette idée à beaucoup de domaines, en se demandant notamment quel type de gestion on veut par rapport à l’eau ou à la santé publique. On est de plus en plus confronté à une logique d’externalisation ou de privatisation dans ces domaines, et cela empêche que les gens puissent décider des choses qui ont des répercussions sur leur vie de tous les jours. On espère ainsi donner du contenu à cette « souveraineté ». C’est un mot souvent utilisé, mais il est difficile de parler de souveraineté quand il n’y a pas les structures économiques et sociales qui permettent de décider.

Pour beaucoup, l’idée de l’État-nation est un concept intrinsèquement lié au nationalisme, à l’exclusion et aux conflits entre États. Comment penser l’émancipation tout en pensant en termes de nations ?

Si l’on se penche sur l’histoire de la Catalogne, on constate que ces aspirations indépendantistes n’ont rien à voir avec ce type d’imaginaire. Il faut aussi faire l’effort de décoloniser ses pensées : ne pas accepter ces aspirations, c’est aussi accepter ce qui existe déjà, c’est-à-dire l’État espagnol — qui est, lui, la pire des constructions. L’absence d’un projet alternatif équivaut à rester dans ce qui existe. Je n’arrive pas à comprendre comment dans une vue anticapitaliste ou libertaire des choses, on ne puisse pas voir l’opportunité révolutionnaire que nous posons sur la table. La République catalane sera-t-elle démocratique, égalitaire, féministe ? Nous ne le savons pas. En revanche, nous savons que tout cela est impossible au sein de l’État espagnol.

Pourtant, le paysage politique espagnol a beaucoup changé ces dernières années, avec, à la clé, peut-être une vraie perspective de changement…

Podemos, puisque c’est de cela qu’on parle, nous disait : « Attendez que nous gagnions les élections, que nous soyons au gouvernement, et vous l’aurez, votre référendum ! » Même si nous n’avions pas forcément envie d’attendre encore, nous leur disions que nous serions heureux qu’ils réussissent. Non seulement ils n’ont pas réussi à gagner, mais avec la force qu’ils représentent aujourd’hui, il est absolument impossible de réussir à modifier la Constitution espagnole. Nous disons donc à Podemos : « Si vous défendez le droit des peuples à décider de leur sort, il faut que vous travailliez avec nous ». Il ne s’agit pas des intérêts de la CUP, il s’agit de la grande majorité du peuple catalan qui veut décider de son avenir. Nous croyons aussi que nous pouvons, de par notre lutte, contribuer à dynamiter les bases de cet État espagnol impossible à changer.

Historiquement, les luttes de « libération nationale » se sont quasiment toujours faites à travers une alliance entre les classes ouvrières et la bourgeoisie nationale, et aux dépens du traitement de la question sociale…

Pour nous, il n’y a pas de hiérarchie entre la question nationale et la question sociale. Nous travaillons tous les jours en faveur de la justice sociale. Très souvent, au Parlement, nous ne soutenons pas les propositions du gouvernement, que ce soit lié aux questions d’éducation, de santé, ou d’autre chose. Parfois, nous restons isolés, par exemple lorsque nous demandons la nationalisation des infrastructures ou lorsque nous faisons des propositions destinées à combattre la corruption. Nous considérons que ce processus d’autodétermination est une rupture avec l’État, mais qu’il peut aussi l’être avec le système économique. Nous travaillons pour réussir à convaincre beaucoup de gens que l’indépendance ne signifie pas seulement changer de drapeau ou de langue officielle. Non, c’est un processus de démocratisation, surtout à un moment où dans l’Union européenne, il n’y a pas tellement d’options progressistes. La Catalogne pourrait devenir une sorte d’exemple à suivre au niveau européen.

Au sein du mouvement indépendantiste catalan, nombreux sont ceux qui défendent l’idée d’une Catalogne englobant les territoires catalanophones sur le territoire français. C’est une vue basée sur la question linguistique et des considérations historiques… Comment définissez-vous ce qu’est la Catalogne ?

Il est vrai, qu’à la base, la définition du sujet politique est principalement liée à la question linguistique, et aussi historique. Mais nous ne voulons pas d’un indépendantisme qui regarde toujours en arrière. C’est un projet du futur qui n’est pas lié à des questions identitaires. C’est un projet qui est surtout lié à la volonté des gens et au potentiel révolutionnaire du sujet. C’est révolutionnaire de combattre la cartographie du pouvoir. Suis-je féministe pour des questions liées à l’histoire, parce qu’on a brûlé les sorcières ? Oui, mais surtout pour des questions liées au futur, parce que je vois le potentiel révolutionnaire de la question. C’est la même chose avec la question nationale en Catalogne.

Vous venez des mouvements libertaires, historiquement très forts en Catalogne — tout comme le mouvement indépendantiste. Ces mouvements n’ont pas toujours entretenu de bonnes relations. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Je crois que le mouvement anarchiste en Catalogne, et je le dis avec beaucoup d’amour, en est encore aux années 1930, et pense encore à la révolution de 1936 et à l’expérience absolument brutale de la guerre civile. Je crois que, parfois, il ne réussit pas à actualiser son projet politique par rapport à la situation que nous vivons actuellement. Par ailleurs, je trouve qu’il est absolument nécessaire de travailler ensemble, parce que même si tu combats l’État en tant que construction, tu peux défendre le droit à l’autodétermination. Ce n’est pas une contradiction. Malheureusement, parfois dans les gauches, les étiquettes — et parfois les égos — nous empêchent de travailler beaucoup plus ensemble. Mais il y a beaucoup plus d’exemples de coopération que de l’inverse et au sein de la CUP, il y a beaucoup de personnes se revendiquant du libertarisme.

Comment voyez-vous l’avenir du mouvement indépendantiste ?

Je crois qu’on verra bientôt si nous avons la force de désobéir à tout un État et je crois que cela va être décisif. Si nous réussissons, je crois aussi que ça sera une très bonne nouvelle, non seulement pour la Catalogne, mais pour le monde entier : nous aurons réussi à démontrer que désobéir collectivement peut mener à un futur plus digne. Il y a également le risque de rester à l’intérieur du cadre posé par la loi, de devenir victimes de la répression, ou encore de ne rien changer. Nous travaillons pour rendre les gens conscients du fait que tout ce qui a été obtenu par la classe ouvrière l’a été grâce à la lutte, souvent à la désobéissance, et que beaucoup de gens en ont payé un prix très élevé. Tout cela ne sera pas facile, ce sera long.


REBONDS

Article mis à jour le 09 mai 2017 : voir en bas de page.

Le Télégramme nous apprenait mardi 2 mai que le Tribunal administratif de Nantes a validé les suspensions de fonction de deux gardiens de prison pour avoir fait des saluts nazis dans le tram à Nantes.

Les faits étaient survenus tard dans la nuit du 27 septembre 2014 après une journée de manifestation pour la réunification de la Bretagne : 4 militants d’extrême droite alcoolisés avaient chanté à la gloire de l’armée allemande nazie, avant de faire des saluts nazis et de proférer des insultes racistes à l’encontre des agents de la Tan, pour finir en bousculade en sortant de la rame du tram.

Le 14 octobre 2014, deux de ces militants d’extrême droite avaient été condamnés devant le Tribunal correctionnel à 400 € d’amende pour « violences sur agents », et les deux autres à 5 mois de prison avec sursis pour « incitation à la haine raciale ».

Il s’avère que les deux personnes condamnées pour « incitation à la haine raciale » étaient à cette époque gardiens de prison, donc fonctionnaires de l’état français ! L’un s’était d’ailleurs « déjà vu reprocher par le passé des “écarts de langage” par l’administration pénitentiaire » selon Le Télégramme. Les fonctionnaires pouvant être suspendus en cas d’infraction de droit commun, c’est donc le Tribunal administratif de Nantes qui s’en est chargé cette semaine (ils ont par ailleurs fait appel de cette décision).

L’histoire aurait pu s’arrêter là mais ce serait laisser croire à un « simple dérapage » et donc faire oublier le caractère militant de ces deux gardiens de prison d’extrême droite. Le site Seizh nous indiquait déjà en 2015 que l’un des deux protagonistes n’est autre que Jean-Charles Troudet, qui s’est présenté à diverses reprises comme secrétaire du groupuscule néo-nazi Adsav. Il a par exemple été l’un des co-organisateurs d’une manifestation mouvementée à Brest au mois d’octobre 2015.

Jean-Charles Troudet avec le mégaphone “Adsav” sur une capture d’écran de la vidéo du Télégramme.

Mais JC Troudet a surtout participé à la manifestation anti-migrants du 14 novembre à Pontivy. Lors de cette manifestation qui a eu lieu le lendemain des attentats de Paris — dont on peut d’ailleurs se demander pourquoi elle avait été tolérée alors que l’état d’urgence venait d’être décrété… — des violences avaient eu lieu et plusieurs personnes avaient été blessées, l’un notamment parce qu’il est d’origine antillaise.

Le nom de Troudet n’est pas inconnu dans les sphères d’extrême droite : un certain Nicolas Troudet (frère de Jean-Charles le maton) aurait participé à une manifestation contre un projet de mosquée à Quimper, et on pourrait comprendre dans cet article de Côté Quimper qu’il est l’un des porte-paroles d’Adsav. Lui n’est pas gardien de prison, mais il est gérant de la SARL NITRO, qui n’est autre que l’entreprise de gestion du restaurant « Au rendez-vous des pêcheurs » situé à Pont-Augan à Baud (56150).

Le bar-restaurant “Au rendez-vous des pêcheurs” situé à Baud dans le Morbihan

A priori, rien de bien intéressant dans cette information… si ce n’est que ce restaurant sert régulièrement de lieu de réunion à l’extrême droite avec, par exemple, la venue l’année dernière de Carl Lang du Parti de la France et de Nicolas Bay du Front National !

Pour le coup, on voit bien que les soi-disant revendications bretonnes d’Adsav sont factices, puisqu’il s’agissait de réunions bien françaises et bien avant tout d’extrême-droite ! Et leur présence dans les manifestations pour l’unité de la Bretagne sous ce nom ou celui de leurs nombreux cache-sexes Jeune Bretagne, Bloc Identitaire, et plus récemment Yaouankiz Breizh ou Stourm (qui regroupe des militants du GUD Bretagne et de l’Action Française) est à combattre et à rejeter au même titre que celle du Front National. Les associations progressistes du mouvement breton telles que Bretagne Réunie doivent le comprendre et prendre leurs dispositions pour que ce genre d’événements dramatiques ne se reproduisent pas.

Toutes les informations contenues dans cet article sont publiques et vérifiables dans les liens.

MISE A JOUR : M. Nicolas TROUDET, gérant du “Relais des Pêcheurs” nous fait savoir qu’il nie avoir jamais été porte-parole d’Adsav contrairement à ce qu’indiquait Coté Quimper le 25/10/2014. Nous remarquons qu’il n’avait pas poursuivi ce média pour cette affirmation. Par ailleurs, il affirme accueillir aussi bien le FN que la CGT dans son établissement. Nous avons transmis cette affirmation à l’UL CGT de Pontivy.  Nous publierons sa réaction si besoin. Enfin, nous n’avons absolument pas l’intention de nuire à la réputation de M. Nicolas Troudet et de son établissement. D’ailleurs nous notons que M. Troudet Nicolas ne nie pas être le frère de M. Troudet Jean-Charles et qu’il ne poursuit pas le Parti de la France ni le FN du Morbihan pour avoir publié des affiches avec l’adresse de son établissement. S’il souhaite nous poursuivre en justice comme il le prétend, nous pensons que notre avocat, prévenu de son éventuel plainte, sera à même de faire valoir notre bonne foi. Pour notre part nous ne manquerions pas d’assurer la plus grande publicité à une telle plainte.
Bretagne info.